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LA
PROPRIÉTÉ RURALE
EN FRANCE


On estime aujourd’hui mal administrée toute fortune qui repose exclusivement sur la propriété foncière, mais aussi l’on doute fort de la solidité des fortunes qui se composent uniquement de valeurs mobilières. Les différences de stabilité et de productivité qui existent entre les deux modes de placement expliquent pourquoi ils peuvent, en se combinant dans de sages proportions, constituer toujours une richesse en même temps plus maniable et plus fixe, plus féconde et plus puissante. Les qualités distinctes de la propriété foncière et de la propriété mobilière les soumettent, on le comprend, à des règles économiques diverses. Plus capricieuse ou tout au moins plus sujette à varier, celle-ci échappe pour ainsi dire à une direction assurée. L’inconstante faveur du public, le mérite éphémère de l’homme qui l’administre, tels sont trop souvent les éléments de ruine ou de succès sur lesquels s’appuie la fortune mobilière. La fortune foncière repose sur une assiette plus solide : elle ne doit guère espérer d’aussi rapides progrès, mais elle ne court pas des risques aussi graves. Les diverses manières de l’exploiter peuvent en conséquence donner lieu à des remarques plus précises.

Il y a quelques années, on constatait en France une fâcheuse tendance des capitaux à délaisser complétement la propriété territoriale pour se reporter vers ce qui est valeur industrielle proprement dite, ou valeur de bourse. Certains esprits moroses prononcèrent même à ce propos le nom de Law, et, en comparant les deux époques, se crurent autorisés par notre fièvre de spéculation à prédire