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L'AGITATION ALLEMANDE
ET
LE DANEMARK

Dans les vieux poèmes du moyen âge, quand le héros, au fort du combat, désespère de remporter à lui seul la victoire, on le voit invoquer une assistance occulte et surnaturelle ; il s’enveloppe tout à coup d’un nuage à travers lequel on ne peut répondre à ses coups, ou bien il enveloppe son rival lui-même pour l’attirer en aveugle vers un abîme caché. Politiquement, l’Allemagne nous paraît dans maintes occasions, évitant la lutte découverte, en agir précisément de la sorte. L’embarras de sa constitution fédérale, la multiplicité de ses arrangemens territoriaux, le mécanisme compliqué des comités et de la diète qui siègent à Francfort, l’enchevêtrement des factums allemands et de leurs annexes, ce labyrinthe qui du monitorium conduit à l’excitatiorium et puis à l’inhibitorium, tout cela forme autour d’elle une obscurité périlleuse, où les faibles, dès qu’ils y sont une fois engagés, doivent craindre de se voir insensiblement enveloppés tout entiers sans que la main qui voudrait du dehors les secourir puisse nettement savoir où se porter et comment agir.

Ce n’est pas que la confédération germanique manque de lois précises, ou bien que les textes soient difficiles à trouver : il n’y a pas si longtemps que le pacte fédéral et l’acte final ont été rédigés[1] ;

  1. Le tome troisième du Recueil de traités et conventions de Martens et Cussy (1846) contient tout ce qu’il est nécessaire de connaître à ce sujet. À la page 144 se trouve l’acte pour la constitution fédérative de l’Allemagne, signé à Vienne le 8 juin 1815, en vingt articles. à la page 403 est l’acte final des conférences ministérielles, signé à Vienne le 15 mai 1820, et comprenant soixante-cinq articles. C’est de cet acte final (articles 54-61) que nous nous servirons principalement dans le cours de cette discussion.