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luttes désastreuses qui éclatèrent entre les anciens colons hollandais (les Boërs) et la communauté anglaise. L’eau n’y manque pas ; mais le pays est trop accidenté, trop couvert de broussailles, pour que l’irrigation y soit facile sur une grande étendue. Les bêtes fauves y abondent, les Hottentots insoumis le parcourent. Enfin il n’y a encore ni routes, ni ponts, ni moyens de transport organisés, à l’exception cependant des célèbres chariots attelés de bœufs qui rappellent un peu trop les guerres de Darius et d’Alexandre en fait de commodité et de rapidité de locomotion. Somme toute, Port-Natal produira un jour du coton, personne n’en doute, mais n’en produira point assez tôt pour conjurer la crise qui se prépare. Avant que cette culture prenne pied dans le pays, le commerce en exploitera les richesses naturelles : dents d’éléphant, d’hippopotame, cornes de buffle, plumes d’autruche, cire, peaux, etc., en échange d’articles manufacturés. Comme preuve de la prospérité, qui attend Port-Natal, citons les paroles récentes d’un voyageur français, M. Delegorgue : « J’ose néanmoins prédire que ce port est destiné, par sa position et sa forme, à devenir le plus sûr et le plus important de l’Afrique australe. »

Les Indes orientales, les présidences de Madras, de Bombay, Surate, les contrées du centre situées plus près de l’Himalaya, le Scind, telles sont les véritables sources dont l’Angleterre et le monde manufacturier doivent attendre their regular supply of raw material. Les populations de ces contrées ne diffèrent en rien des fellahs d’Égypte ; elles sont agricoles, et les autres agens de succès, le soleil, l’eau, une terre fertile et une main-d’œuvre à bon marché, s’y rencontrent partout. Le coton herbacé (gossypium herbaccum) y croît en abondance, et la récolte totale y égale à peu près celle des États-Unis. C’est cette espèce, très exiguë de taille, qui fournit les basses qualités que nous consommons sous le nom de bombay, surate, madras, etc., et qui ne sont que l’excédant de la consommation indigène ou de ce que le commerce natif exporte en Chine et au Japon. Quoique le rendement en soit avantageux sous le rapport de la quantité, ce coton laisse énormément à désirer pour la qualité. La soie, sans en être très courte, est faible, et le duvet tellement malpropre et floconneux (mélange de fibres nouées et sans force) qu’il laisse un déchet énorme en passant dans les batteuses. La cueillette en est rendue difficile par le peu de résistance qu’offre aux doigts des enfans la noix ou fruit (pod), mal attachée à une tige fine et cassante, par les brisures d’une longue feuille qui enveloppe en partie cette noix, très petite, d’où s’échappe le coton, par l’insouciance enfin tout orientale des paysans, qui ne pressent point assez la végétation pour que les noix dues à une floraison tardive arrivent à