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LA
QUESTION DU COTON
EN ANGLETERRE
DEPUIS LA CRISE AMERICAINE

Une question industrielle d’une importance vitale agite en ce moment la Grande-Bretagne. Cette question n’est pas nouvelle ; on y pensait quelquefois comme à un danger possible, mais si éloigné qu’on n’en pouvait encore déterminer l’époque. La redoutable crise que traverse à cette heure même l’Union américaine a fait enfin tomber le voile ; il ne s’agit de rien moins que de la production du coton et des moyens de tenir l’Angleterre abondamment approvisionnée de cette fibre précieuse, d’un usage si général. Qui aurait pu s’imaginer que la prospérité d’une industrie aussi colossale dans son ensemble, si fortement liée dans ses produits aux habitudes, aux besoins des peuples, pût dépendre d’une révolte d’esclaves ? Qui aurait osé supposer un seul instant que l’Angleterre, le pays le plus intéressé dans la question, abandonnât aux.chances les plus périlleuses cette industrie qui est la moelle de ses os, et que chacun, sur les points les plus reculés du globe, s’est habitué à considérer comme absolument anglaise ?

Aujourd’hui cependant la face de l’édifice économique et politique a éprouvé de grands changemens. La France, par son récent traité avec la Grande-Bretagne, a déplacé bien des intérêts, semé bien des germes d’équilibre futur dans la production manufacturière,