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de citer indiqueraient même le croisement soit entre des races extrêmement voisines, soit entre de simples variétés, tant ils rappellent ce que nous avons vu se passer entre le daim noir et le daim blanc. Toutefois l’étude des races et espèces animales nous montre, une telle variabilité dans les faits de cette nature, que nous n’attacherions pas grande importance aux résultats précédens, sans une circonstance qui mérite d’être signalée. Tous les exemples que nous avons reproduits, et ceux, en bien plus grand nombre, que nous aurions pu citer encore, ont été recueillis chez des nègres vivant loin de leur patrie originelle, et dans des régions plus tempérées. Le docteur Winterbottom, qui a étudié avec tant de soin la race noire dans son pays natal, paraît n’avoir connu aucun fait du même genre[1]. Serait-ce donc que le croisement ne produirait de semblables résultats qu’en dehors du climat africain, et sous l’influence d’un changement de milieu ? Il est encore difficile de répondre avec certitude à cette question. Nous ne voulons que la poser et appeler sur elle l’attention des observateurs placés dans des conditions favorables pour la résoudre ; mais si la réponse était affirmative, comme les faits connus porteraient à le croire, il y aurait là une preuve de plus en faveur de nos doctrines. En effet, le changement de milieu ne paraît pas modifier le résultat de l’hybridation. Les caractères du mulet et du bardot, par exemple, restent les mêmes partout où ils se produisent. Au contraire ce changement, on l’a vu, modifie les races ; il ébranle, on le sait, le type nègre. Il serait donc tout simple que celui-ci cédât plus aisément à l’influence du type blanc dans les croisemens effectués en France, en Angleterre, aux États-Unis, que dans ceux qui ont lieu à Sierra-Leone ou sur la côte de Mozambique.

Au reste, si nous arrêtons un instant le lecteur sur les considérations de cet ordre, c’est uniquement pour montrer combien la doctrine de l’unité s’accorde avec les lois générales jusque dans les moindres détails. La grande preuve de la vérité de cette doctrine n’est pas là. Elle est avant tout dans la manière dont se comportent les groupes humains dans les unions croisées. Nous avons vu ce qu’était le résultat immédiat de ces unions ; leur fécondité atteste le métissage, et écarte bien loin toute idée l’hybridation. Cette fécondité

  1. Le docteur Winterbottom s’est beaucoup occupé de l’albinisme chez les nègres, et c’est en se fondant en partie sur quelques-uns des faits rapportés par cet auteur que Prichard a été conduit à penser que tous les nègres blancs, regardés comme de vrais albinos, pouvaient fort bien être des espèces d’intermédiaires entre les races noires et les races blanches à cheveux rouges. Il y a certainement du vrai dans cette idée de l’anthropologiste anglais ; mais nous ne pouvons examiner ici cette question avec tout le développement qu’elle exigerait.