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ou hybride, aurait été le point de départ ? En d’autres termes, existe-t-il des races métisses et des races hybrides, dérivant, les premières, de deux races différentes d’une même espèce, les secondes de deux espèces distinctes, et dont tous les représentans possèdent à des degrés plus ou moins marqués des caractères empruntés aux deux races ou aux deux espèces ?

Le doute n’est pas permis quand il s’agit des métis. Une expérience journalière s’accomplissant sans cesse et parfois sans l’intervention de l’homme prouve que les produits du premier croisement entre races végétales sont aussi féconds que les parens. Nos parterres, nos potagers, nos jardins fruitiers présentent un grand nombre de races qui se sont fixées et caractérisées après avoir été obtenues par l’intervention soit de deux races préexistantes, soit de deux variétés. Le chiffre en serait certainement bien plus élevé encore sans les facilités que les procédés généagénétiques fournissent à l’agriculteur pour abréger sa tâche. Excepté lorsqu’il s’agit de végétaux annuels se reproduisant exclusivement par graines, le jardinier se donne rarement la peine de constituer une race nouvelle, dont l’établissement exige toujours des soins plus ou moins prolongés. Il préfère employer les tubercules, les ognons, la greffe, le marcottage, etc., pour multiplier les variétés qui ont à un titre quelconque attiré son attention, et le métissage n’est bien souvent employé qu’à produire ces variétés. Toutefois ces dernières même ont fourni à M. Godron une observation importante qui doit trouver sa place ici. Chez les métis, on ne remarque jamais une prédominance anomale des organes de la végétation sur les appareils floraux. Ce fait seul atteste l’intégrité des fonctions reproductrices. Il indique que l’équilibre existant naturellement entre celles-ci et les autres fonctions de l’organisme a été respecté par le métissage. Nous verrons qu’il en est tout autrement dans les cas d’hybridation.

La fécondité des métis est peut-être plus universellement démontrée chez les animaux. Ici il n’existe plus ni greffes, ni marcottages pouvant reproduire à volonté l’individu résultant d’une seule union croisée. C’est seulement par la répétition des mariages qu’on peut établir et fixer une race mixte. Or que dit ici l’expérience ? Ne nous apprend-elle pas qu’à quelque degré qu’on les prenne, ces mariages sont partout et toujours féconds ? Nos métairies, nos champs sont remplis de races métisses, et si ces races se maintiennent, ce n’est que grâce à la surveillance. Dès que celle-ci se relâche, l’instinct de la reproduction, agissant sans contrôle, confond et mêle tous les sangs avec une promptitude qui atteste mieux que toute autre chose la parfaite fécondité des métis à n’importe quel degré. Demandez au premier éducateur venu ce qui arriverait, si on lâchait dans le