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l’empire d’une législation qui permet de confondre les budgets de deux départemens ministériels, fussent-ils réunis dans la même main, qui permet de consacrer aux frais du culte des sommes votées pour l’instruction publique, de détourner de leur destination des fonds spécialement affectés au service de la dette publique par un vote législatif, pour les appliquer aux dépenses d’un ministère. Les chiffres officiels montreront assez que des réclamations si nombreuses et si réitérées n’étaient pas sans de graves motifs.


Dans les sept années de 1852 à 1850[1], les supplémens de crédit se sont élevés à 2,622,303,766 fr.
Les crédits annulés à 256,355,979
Différence 2,365,947,787 fr.
Moyenne annuelle 336,000,000
Dans les dix-huit années de 1830 à 1848, les crédits accordés en supplément se sont

élevés à

2,097,325,656 fr.
Les crédits annulés à 623,472,038
Différence 1,468,853,018 fr.
Moyenne annuelle 81,000,000

Il est vrai que les crédits de 1854 à 1856 ont été en grande partie motivés par la guerre de Crimée ; mais les années de paix 1853, 1857 et 1858 présentent des supplémens de crédits pour 296 millions.

L’oubli du passé ne peut aller jusqu’à effacer le souvenir des grandes et utiles entreprises dont les finances de la monarchie de 1830 eurent à supporter le fardeau. La France, après avoir sauvé la Belgique de l’invasion hollandaise, lui a rendu Anvers ; la France a fait l’expédition d’Ancône, forcé l’entrée du Tage, planté son pavillon sur les murs de Saint-Jean-d’Ulloa et fondé nos établissemens de l’Océanie ; enfin, au prix de longs efforts, d’un sang précieux, de sommes considérables, elle a noblement acquitté, en achevant la conquête de l’Algérie, le legs glorieux de la restauration.

Jamais peut-être les conséquences du nouveau système n’ont été mises plus en évidence que par la discussion, dans la session de 1860, du projet de loi pour l’affectation à des travaux d’utilité générale des fonds restés libres sur le dernier emprunt de 500 millions[2]. Ce reliquat, dont on avait tant parlé, se trouvait réduit à 31 millions ; encore ce chiffre, contesté dans le sein de la commission d’abord, puis par les orateurs qui prirent la parole dans la séance du corps législatif, ne fut-il établi que par évaluation approximative.

  1. Je n’ai pas fait entrer dans ces calculs l’année 1850, parce que le règlement définitif de cet exercice ne m’est pas encore connu.
  2. Voyez le Moniteur du 28 juin 1860.