Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 31.djvu/691

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

royales et être soumis à la sanction des chambres dans leur plus prochaine session, avant la présentation du budget ; ils étaient strictement restreints à une nomenclature spéciale de services votés. Si la nécessité d’une dépense non prévue au budget venait à se faire sentir, on y pourvoyait au moyen des crédits extraordinaires. Il fallait, pour motiver l’ouverture d’un crédit extraordinaire, des cas tout à fait imprévus et exceptionnels. Il est inutile d’insister sur les garanties que ces règles salutaires offraient pour la stricte observation de la spécialité.

La constitution de 1852 autorisant les viremens de crédits d’un chapitre à l’autre et l’affectation des fonds rendus libres à tout autre service du même ministère, il est aisé de comprendre que la nécessité des crédits supplémentaires devait être fort rare, et que les crédits extraordinaires devaient sembler à peu près seuls destinés à faire face aux besoins nouveaux résultant de circonstances imprévues. M. Schneider fut un des premiers à montrer quelles seraient pour le gouvernement les conséquences obligatoires du nouveau système substitué aux règles qui présidaient naguère au vote des budgets, et la commission dont il était l’organe n’hésitait pas à laisser voir, sous des formes respectueuses, ses regrets de l’abolition de ces règles : « Il ne nous appartient pas de juger un acte constitutionnel ; nous lui devons notre respect, et nous entendons donner au gouvernement, pour l’application de cet acte, notre concours le plus complet. — Il suffit de rappeler le texte du sénatus-consulte pour faire connaître dans son ensemble le régime nouveau que nous allons inaugurer ; nous n’avons pas à l’exposer dans ses détails d’application, dont le temps et l’expérience sont d’ailleurs les meilleurs juges. — Il nous a paru que le droit de virement devait donner à l’avenir aux prévisions du budget, prises dans leur ensemble, un caractère de vérité et d’exactitude dont elles manquaient précédemment. On doit attendre de ce système un double avantage : d’une part, le ministre, obligé de se renfermer en définitive dans les limites de son budget, sera naturellement appelé à réaliser toutes les économies compatibles avec les besoins du service, et d’autre part on pourra voir disparaître ces annulations de crédit et ces crédits supplémentaires qui venaient chaque année bouleverser les prévisions et rendaient trop illusoire le vote du budget. — Dans les conditions nouvelles où nous nous trouvons, nous ne saurions insister trop fortement pour que les crédits supplémentaires disparaissent à l’avenir… La suppression des crédits supplémentaires et des annulations de crédit nous apparaît comme l’une des conditions capitales du régime nouveau[1]. »

  1. Rapport de M. Schneider sur le projet de budget de 1854. Moniteur du 12 mai 1853.