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cependant les réserves dépassèrent 200 millions ; on jugea excessif le résultat de ce respect absolu de la règle, et une transaction intervint, qui, tout en assurant l’extinction successive de la dette, permit de soulager les contribuables. Une partie des réserves fut appliquée aux travaux publics, dont elle forma le fonds extraordinaire, et la caisse d’amortissement reçut des inscriptions de rentes en échange du capital ainsi employé ; des lois spéciales prononcèrent successivement l’annulation de rentes provenant de la consolidation des réserves. Ainsi fut longtemps maintenue une balance équitable entre les droits et les intérêts du présent, les droits et les intérêts de l’avenir.

C’est dans cette voie que le gouvernement impérial avait paru vouloir rentrer en 1859, après dix années d’interruption ; il ne devait guère y persister. Deux ans ne s’étaient pas écoulés que la totalité des ressources de l’amortissement était de nouveau appliquée à faire face à l’insuffisance des ressources du trésor. En présence d’un déficit de plus en plus certain, en présence des conséquences inévitables de la réforme économique sur les recettes et de la progression constante des dépenses, dans l’état troublé de l’Europe, et même en espérant qu’une troisième guerre nous soit épargnée, il est difficile de prévoir l’époque où l’amortissement exercera de nouveau une action salutaire, rendue plus nécessaire que jamais par la progression si rapide qu’a suivie la dette publique.

Lorsqu’on arrête un moment son attention sur les résultats merveilleux dus au respect de la monarchie constitutionnelle pour l’amortissement, on ne peut, après avoir admiré les bienfaits de ce puissant moyen de libération, s’empêcher de regretter profondément que le gouvernement actuel de la France ne considère pas, à l’exemple de ses prédécesseurs, cette institution comme un dépôt sacré. À la rigueur, on comprendrait que les nécessités d’un temps de crise et de guerre eussent fait accepter momentanément un tel sacrifice ; mais, en pensant où en serait aujourd’hui la dette publique sans la sagesse de nos devanciers, tout ami du pays formera des vœux ardens pour que la raison reprenne ses droits et que l’exception ne se substitue pas définitivement à la règle.


Au 1er avril 1814, le montant des rentes inscrites pour la liquidation des anciennes dettes de l’état et des pays réunis s’élevait à 63,301,637 fr.
Depuis cette époque, les rentes créées pour les besoins du service représentent 487,691,090
Ce qui porte le total des rentes créées jusqu’au 1er janvier 1860 à (Compte de 1859, p. 41) 550,998,727 fr
A reporter… 550,998,727 fr.