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j’étais invité et où le corps diplomatique se rend, non pas précisément officiellement, mais cependant en uniforme. Cette dernière circonstance m’aurait déterminé, si j’avais hésité sur la conduite que j’avais à tenir. On a cherché en effet à me faire dire que je ferais peut-être mieux de m’abstenir. Je me suis retranché derrière mon droit et mon ignorance absolue des motifs qui pourraient me faire m’abstenir volontairement d’un bal où va la cour et où se trouvera tout le corps diplomatique.

« Ce n’est qu’après le 1er janvier, quand je serai retourné au palais, qu’on peut attendre dans la société le revirement qui m’est annoncé. Je devrai, ce me semble, me montrer poli, mais froid. J’attendrai les avances qui pourraient m’être faites sans les chercher, mais sans les repousser. Je sens et sentirai davantage par la suite le besoin d’être soutenu par vous. Croyez du reste, monsieur, je vous en prie, que ce n’est pas un intérêt personnel qui me le fait désirer. Dans les circonstances où je me trouve, je me mets complètement hors de la question, et, en ce qui ne concerne que moi, vous me trouverez disposé à me soumettre avec abnégation à tout ce que vous croiriez utile de m’ordonner. »

Dès que j’eus appris, par sa dépêche du 21 décembre, que mes instructions avaient été ponctuellement exécutées, j’adressai à M. Casimir Sérier les deux lettres suivantes, l’une officielle, l’autre particulières :


« M. Guizot à M. Casimir Périer.

« Paris, 4 janvier 1842.

« Monsieur, j’ai reçu la dépêche que vous m’avez fait, l’honneur de m’écrire le 21 décembre, et dans laquelle vous me dites que le 18 du même mois vous vous êtes exactement conformé à mes instructions, en évitant toutefois avec soin ce qui aurait pu en aggraver l’effet. D’après la teneur même de ces instructions, je dois présumer, quoique vous n’en fassiez pas mention expresse, que vous avez eu soin de motiver par écrit votre absence de la cour sur un état d’indisposition. Vous saurez peut-être déjà, lorsque cette dépêche vous parviendra, que M. de Kisselef et sa légation n’ont pas paru aux Tuileries le 1er janvier ; peu d’heures avant la réception du corps diplomatique, M. de Kisselef a écrit à M. l’introducteur des ambassadeurs pour lui annoncer qu’il était malade. Son absence ne nous a point surpris. Notre intention avait été de témoigner que nous avons à cœur la dignité de notre auguste souverain, et que des procédés peu convenables envers sa personne ne nous trouvent ni aveugles ni indifférens. Nous avons rempli ce devoir. Nous ne voyons maintenant, pour notre compte, aucun obstacle à ce que les rapports