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pent 50 ou 60 pour 100 de la surface, de sorte qu’avec les cultures fourragères les deux tiers du sol sont consacrés à l’entretien du bétail.

Après les cultures destinées directement ou indirectement à la nourriture de l’homme viennent les cultures industrielles. Parmi celles-ci, la plus importante est celle du lin. Le fin jouait jadis dans l’économie du pays, quoiqu’en des conditions plus humbles, le même rôle que la soie dans celle de l’Italie. Il était pour le cultivateur une source de produits à la fois agricoles et industriels, car tout le travail qu’exigeait la confection des célèbres toiles de Flandre se faisait aux champs. Aujourd’hui que la filature mécanique a remplacé le fuseau et la quenouille, une partie de l’ouvrage s’exécute dans les villes et à l’étranger. Cependant le rouissage, le teillage et le tissage distribuent encore parmi les populations rurales une somme de salaires très importante. L’exportation de la toile a considérablement diminué ; mais depuis que la France et l’Angleterre viennent acheter la fine qualité de filasse rouie dans la Lys, et que les filatures de Gand ont augmenté leurs ventes hors du pays, la culture du fin s’est relevée insensiblement, et elle occupe aujourd’hui une étendue à peu près aussi grande qu’autrefois. Le lin exige de grandes avances pour l’engrais, pour la main d’œuvre et pour la graine à semer, qu’on fait venir de Riga. On estime ces avances de 5 à 700 fr. par hectare ; encore obtient-on une récolte très chanceuse, que la grande humidité pourrit et que la grande sécheresse brûle. Dans les années favorables, elle se vend sur pied, aux environs de Courtray, de 120 à 150 fr. Les neuf ares, non compris la graine, soit de 13 à 1,700 fr. L’hectare. Dans la Flandre orientale, le produit le dépasse guère 1, 000 fr.

Le tabac rapporte encore davantage. Chaque fermier en plante pour sa consommation ; mais le tabac n’est cultivé en grand que dans certains cantons, notamment aux environs de Commines et de Wervicq, où il acquiert une saveur pénétrante appréciée jusque sur l’autre bord de l’Atlantique. Le produit en est beaucoup plus grand qu’en France, même dans les meilleurs départemens ; mais les frais de cette culture sont énormes. Là où on la soigne, on estime le produit d’un hectare à plus de 2,000 kilog. d’une valeur de 2,600 fr. et la dépense à 2,200 fr., dont 1,500 fr. d’engrais et 700 fr. de main d’œuvre et de charges diverses. On comprend qu’une production qui exige des soins aussi incessans n’est possible que dans des districts où une population très dense offre toujours des bras disponibles, où l’on est habitué à confier au sol un grand capital.

Une autre culture dont la Flandre peut s’enorgueillir à juste titre est celle du houblon. La vigne du nord, connue on l’a nommé, suspend aussi en guirlandes ses longs sarmens d’un vert sombre.