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78,498 exploitans sur 270,802 hectares de surface productive, et 2,48 hectares dans la Flandre orientale, où 88,305 cultivateurs se partagent 218,098 hectares. Cette moyenne même, toute réduite qu’elle semble, donne à peine une idée de l’incroyable morcellement des cultures. La statistique officielle révèle que dans la Flandre occidentale 45,073 exploitations, soit 57 pour 100, n’atteignent pas 50 ares, et que dans la Flandre orientale il n’y a pas deux fermes sur cent qui dépassent 20 hectares, à peine une sur mille qui aille au-delà de 50. À part la zone du littoral, les fermes de 45 hectares sont très clair-semées : on en rencontre au plus une ou deux par commune ; il y a même un arrondissement, celui de Termonde, où il n’en existe pas une seule de cette grandeur. Celles qui comprennent 20 hectares sont déjà considérées comme grande culture. Les exploitations de quelque étendue, même quand elles restent aux mains d’un seul propriétaire, tendent à se subdiviser par une raison très simple : c’est que, morcelées, elles se louent beaucoup plus cher. Celles qui sont situées à proximité des villages résistent difficilement à la plus-value énorme que leur crée la concurrence des habitans agglomérés. Dans presque chaque commune, on trouve quelque corps de ferme qui, naguère loué en bloc de 70 à 80 francs par hectare, rapporte aujourd’hui de 120 à 150 francs en parcelles de 10 ou 20 ares. Ce morcellement, non de la propriété, mais de la culture, n’augmente pas moins le produit brut que le produit net. La terre est mieux cultivée, beaucoup plus engraissée, et le rendement s’élève à proportion. Dans ses momens perdus, l’ouvrier retourne à la bêche ce coin de terre qu’il s’estime heureux d’avoir obtenu, même aux conditions les plus dures : sa femme le sarcle, ses enfans y apportent toutes les matières fertilisantes qu’ils peuvent réunir, et la famille, en travaillant, il est vrai, davantage, trouve le moyen d’ajouter la récolte de quelques alimens à un salaire par malheur très insuffisant.

C’est une opinion assez accréditée que la grande culture seule peut donner à la terre l’assolement convenable et lui consacrer le capital nécessaire pour mettre en action toutes ses forces productives. Dans les Flandres, c’est le contraire qui est vrai. En général, la terre rapporte et produit d’autant plus que l’exploitation est moins étendue. Le capital est aussi relativement plus considérable sur les petites exploitations que sur les grandes. C’est qu’il y a très peu de personnes qui soient disposées à mettre dans une entreprise rurale de cent hectares une somme de 60 ou 70,000 francs, tandis que le petit cultivateur, qui n’a pas d’autre perspective et qui ne peut songer à vivre de ses rentes, accumule toutes ses économies sur sa terre, augmente sans cesse la quantité du bétail qu’il entretient et de l’engrais qu’il achète jusqu’à ce qu’il ait porté