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beaucoup de temps, beaucoup de soins, un milieu déterminé, une chaleur bien mesurée, soient nécessaires. Au-dessous, tout devient plus facile, et des êtres très inférieurs ont une fécondité merveilleuse. Tandis qu’une vache ne produit qu’un veau en un an, d’un seul insecte naissent des milliers d’insectes semblables. Pourquoi des êtres placés par leur organisation et la durée de leur vie au dernier rang parmi les animaux ne viendraient-ils pas au monde plus facilement encore, si facilement qu’ils puissent trouver partout des substances favorables non-seulement à leur développement, mais à la composition même de l’ovule, du germe qui doit les produire ? Y a-t-il là rien d’absolument contraire aux lois générales de la nature, à ses procédés habituels ? Que la vie, cette force particulière, puisse être puisée dans ces infusions, cela est singulier sans doute ; mais que des milliers de vies soient dans un seul insecte, le fait est-il beaucoup plus clair, et la cause finale d’une telle fécondité n’est-elle pas impénétrable ? A une difficulté on répond aisément par une autre, ce qui démontre clairement que l’expérience seule peut nous faire avancer d’un pas. Aux naturalistes qui s’étonnent qu’un être se produise sans parens et sans germe, qu’une matière organique morte soit encore animée de forces latentes suffisantes pour faire naître ces animaux qui vivent, nagent, meurent et se reproduisent, les hétérogénistes ne pourraient-ils pas demander : Comment ces graines, ces œufs qui paraissent inertes, qui se conservent souvent intacts pendant des années, possèdent-ils, eux aussi, cette force merveilleuse qui peut tour à tour paraître et disparaître ? Pourquoi s’organisent-ils ? Pourquoi germent-ils ? — Et à ces questions les physiologistes ne peuvent guère répondre que cette phrase de la comédie : Parce qu’ils ont une vertu germinative.


PAUL DE REMUSAT.