Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 30.djvu/439

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cautions. Les animalcules sont étudiés et décrits avec un soin minutieux, une clarté parfaite, et leur naissance dans la matière organique est affirmée sans qu’aucun germe y ait été déposé, sans qu’aucun parent mâle ou femelle ait apparu et se soit inquiété de perpétuer sa race. Burdach ne recourt même, pour expliquer leur constante présence, ni à ces divisions, ni à ces reproductions par scission dont les polypes offrent des exemples merveilleux. Il suffit que des matières en décomposition apportent les élémens dont ils sont formés pour que les animaux apparaissent. Versez de même une dissolution de soude dans l’acide sulfurique, et vous verrez bientôt se réunir au fond du vase de beaux cristaux blancs ayant la forme de grands prismes à quatre pans, terminés par des sommets dièdres. Il semble que les molécules organiques n’aient pas besoin d’une direction plus savante et plus compliquée. Quant à Burdach, il ne se borne point à ces animaux inférieurs sur l’animalité desquels on a pu discuter, à ces cryptogames simples et presque sans organes. Il étend ce mode de reproduction très loin, et bien que l’expérience ne lui ait montré la naissance spontanée que dans des êtres imparfaits, il incline à croire qu’il est possible de voir surgir du milieu de la matière organique des vers, des insectes, des crustacés, peut-être même quelques animaux vertébrés.

Bremser, Tiedemann, Treviranus, en général une grande école physiologique en Allemagne, se sont montrés, comme Burdach, partisans de la production spontanée, de l’hétérogénie. En France, depuis longtemps elle n’est plus enseignée ; à peine est-elle discutée malgré les adhésions ouvertes ou implicites dont nous avons parlé. On en parle maintenant sans s’y arrêter et avec des preuves plutôt négatives que positives. On pense à l’Académie comme Voltaire sur ce point, sans citer très souvent cette autorité. Presque sans contestation il est admis que les germes sont nécessaires, et les merveilleuses observations de tant d’expérimentateurs habiles, de M. Serres, de M. Coste, de M. de Quatrefages, en faisant connaître les mouvemens, les phénomènes de l’œuf et le développement des êtres organisés, ont contribué à rendre cette opinion plus certaine. Comment admettre que ces combinaisons, ces développemens, cette organisation se produisent dans une substance ne possédant pas des propriétés particulières, n’ayant pas été composée d’une façon extraordinaire, ne venant pas d’un lieu identique, du sein d’un animal semblable à celui qui va se développer ? Aussi pense-t-on, nous ne saurions trop le répéter, car là est le fondement de toute la théorie, que lorsqu’une substance se décompose et qu’on voit apparaître des êtres vivans, qu’ils soient visibles à l’œil nu ou perceptibles seulement sur le porte-objet des microscopes les plus grossissans, ils ont été appor-