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mens spéciaux, a pour but de faire connaître exactement le volume à exploiter. L’application à ce volume du prix courant des différentes espèces de bois donne la valeur vénale de la coupe à mettre en vente.

L’usage du marteau pour marquer les arbres à réserver est général; il est adopté par les particuliers aussi bien que par l’état, et répandu à peu près dans toute l’Europe. Il est d’ailleurs fort ancien, ainsi que le constatent les vieilles ordonnances sur les eaux et forêts. Autrefois il y avait des agens spéciaux préposés à la garde du marteau royal; ils portaient le nom de garde-marteaux, et étaient placés sur le même rang que les officiers supérieurs des maîtrises. Aujourd’hui les marteaux de l’état, conservés dans des étuis que ferment deux clés, sont déposés chez l’agent forestier chef de service, et ne doivent être employés qu’en présence de deux agens[1]. Le marteau symbolise la profession du forestier, comme la pioche celle du mineur.


II.

La saison la plus favorable pour l’abatage des arbres, dit l’auteur d’un intéressant ouvrage sur l’exploitation des bois, M. Nanquette, paraît être la fin de l’automne et l’hiver. — Pour les essences feuillues, la question n’est pas douteuse; il est aujourd’hui reconnu que les bois coupés à ce moment sont d’une durée plus longue lorsqu’ils sont mis en œuvre, et brûlent plus facilement tout en donnant plus de chaleur que ceux qui sont coupés à toute autre époque. Pour les bois résineux au contraire, nombre de praticiens prétendent qu’il y a avantage à les exploiter en été, et qu’en prenant la précaution de les écorcer immédiatement, ils acquièrent une grande dureté tout en devenant plus légers. Dans bien des localités, les bûcherons attribuent à l’âge de la lune au moment de l’abatage une grande influence sur la qualité des bois. Ce préjugé, fort ancien du reste[2], a été combattu au siècle dernier par Duhamel,

  1. L’emploi de faux marteaux et l’imitation de l’empreinte du marteau de l’état sont assimilés par la loi à la contrefaçon des timbres et punis des travaux forcés à temps. Très fréquent autrefois, ce crime, grâce à une surveillance plus active, a aujourd’hui presque disparu.
  2. « Faites attention, dit Caton l’Ancien (148 ans avant Jésus-Christ) dans son ouvrage sur l’agriculture, de n’abattre l’orme, le pin, le noyer ou quelque bois que ce soit, qu’au déclin de la lune, après midi et lorsque le vent du sud ne soufflera pas. Ces espèces d’arbres sont bons à couper lorsque leur semence est mûre... Ne touchez ni au bois ni au vin tant que le vent du sud soufflera, si ce n’est dans le cas de la plus grande nécessité. » Olivier de Serres fait des recommandations analogues.