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remplir le jour où l’on accepterait la pensée très répandue de faire contribuer pour une part l’élection à la formation de la chambre des pairs ou du sénat. Un membre par département, choisi à vie dans ou par le conseil-général, serait un élément très convenable d’une sorte d’assemblée dont il serait bon de diversifier l’origine. En touchant ainsi par le sommet à la politique, le conseil-général ne deviendrait pas une assemblée politique, mais les départemens se sentiraient moins étrangers au gouvernement.

Les conseils municipaux n’ont pas une aussi bonne renommée que les conseils-généraux, et on comprend que trente ou quarante mille administrations ne peuvent toutes passer pour des modèles. On a pourtant fort exagéré les reproches, et lorsqu’en 1830 le principe de l’élection pénétra dans la municipalité, l’amélioration fut sensible sous le rapport de l’activité et de la résolution. L’initiative locale se montra. Une grande difficulté n’en subsiste pas moins : celle de respecter la spontanéité, la liberté des communes, les plus réelles, les plus historiques de ces personnes civiles que la loi reconnaît, et de régulariser ou même de stimuler leur action, qui n’est pas toujours éclairée ni vive. Tantôt leur prodigalité, tantôt leur parcimonie est à craindre. Enfin les dissensions locales, quoique moins âpres et moins fâcheuses qu’on ne prétend, peuvent tantôt égarer, tantôt paralyser l’ardeur d’un maire passionné ou timide. Que veut-on ? Toute liberté coûte, et si le ciel ne l’eût donnée à l’homme, le péché n’existerait pas. Le point précis à saisir est celui où des abus tolérables ne sont plus compensés par des avantages réels. Dans ses rapports avec l’administration municipale, le gouvernement pourrait se borner à deux choses, tout savoir, quelquefois empêcher ; mais on ne peut se dissimuler que la tendance de la civilisation moderne n’est pas très favorable à la liberté communale. En résumé, là comme ailleurs, la centralisation, le gros de la centralisation restera.

C’est donc moins à la supprimer qu’à la tempérer par d’autres garanties qu’il faut tendre, et M. Dupont-White nous y aidera. On sera peut-être surpris du remède qu’il va chercher à la centralisation dans la centralisation même ; mais il faut savoir que de tous les reproches qu’on lui adresse, le seul qui paraisse le toucher sérieusement, c’est qu’elle facilite les révolutions. Où trône-t-elle en effet ? Dans les capitales. C’est l’existence des capitales, c’est leur importance qui favorise et motive la centralisation. En France, Paris en est la cause aussi bien que le siège. Il centralise la France pour son compte en même temps que le pouvoir se centralise pour lui. Satisfaire Paris, contenir Paris, là souvent a été toute la difficulté de la politique. L’influence de l’esprit, des lumières, des lettres, naît et prévaut surtout à Paris. Paris est le lieu des révolutions. Augmentez