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avec le vieux Piémont, en respectant, dans l’union de la Toscane au nouveau royaume, l’autonomie administrative de cette province.

Nous voyons aujourd’hui ce qui s’est passé en Sicile et à Naples. Quant à ce qui arrivera, on peut prévoir que la volonté nationale prévaudra infailliblement et définitivement. Je ne veux tout d’abord constater qu’une chose, c’est que les événemens ne font que donner raison à l’idée qui à toujours dominé dans l’opinion publique au sujet de la constitution politique de la péninsule. L’opinion publique a compris qu’on ne pouvait élever l’édifice de notre unité nationale sur les ruines récentes qu’en choisissant avec intelligence ce qui reste de notre ancienne civilisation, ce qui ne demande que le souffle de l’indépendance et de la liberté pour reprendre la cohésion et la vie. Que le grand exemple de l’Angleterre nous rassure et nous dirige en même temps. Le pays de Galles, l’Irlande, l’Ecosse, les vieux comtés, n’ont jamais eu et n’ont pas, à l’heure qu’il est, plus d’analogies que les provinces du nord, du centre et du midi de l’Italie, et cela n’a pas empêché l’empire britannique de fonder une des plus puissantes unités politiques et législatives qui aient existé dans le monde.

Résumons-nous donc : on avait cru d’abord que la reconstitution politique de la péninsule pourrait se réaliser sous la forme d’une confédération d’états libres et indépendans. La guerre, les événemens dont elle a été le signal, nous ont conduits à étendre cette idée, et, Dieu aidant, nous arriverons un jour à lui donner une forme définitive, en fondant sous un seul pouvoir politique et législatif une monarchie constitutionnelle, composée de toutes les grandes provinces de la péninsule, dont il faut conserver l’autonomie administrative.

C’est là l’idée générale ; le moyen d’exécution est l’application la plus large possible du grand principe de la décentralisation, ainsi que je l’ai dit dans un précédent essai. Je n’ai point le dessein, en revenant sur ce sujet de premier ordre, et en y ajoutant quelques développemens nouveaux, de formuler des lois ou de tracer des règlemens ; je voudrais simplement, en précisant mieux quelques-uns dès côtés pratiques du problème, montrer dans quels cas et comment le principe décentralisateur pourrait être utilement appliqué, d’accord avec la formule générale que j’énonçais, aux différens pouvoirs administratifs de l’état. Suivant le principe de la centralisation, rien n’échappe à la juridiction suprême du chef de l’état : ses agens, distribués avec autant de prodigalité que de symétrie depuis le plus petit village jusqu’au chef-lieu, sont chargés, — d’une part, de recueillir les informations nécessaires pour éclairer son jugement, — de l’autre, d’exécuter ses ordres. Sous l’empire du principe de décentralisation au contraire, la loi établit des autorités administratives indépendantes et détermine l’étendue de leurs attributions, de sorte qu’en remontant l’échelle de la commune au gouvernement central, chacune de ces autorités s’exerce librement sur toutes les matières qui ne sont pas dévolues par la loi au pouvoir immédiatement supérieur. C’est ce système que nous voudrions voir appliqué parmi nous, comme étant le plus simple, le plus prompt, le plus économique, le plus conforme à nos mœurs et le plus propre enfin à harmoniser les forces nationales en laissant un libre développement à toutes les nuances de caractè