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du moins trop tardive pour que les vendanges puissent donner de bons produits. La quantité même, sur laquelle le nombre inaccoutumé des grappes avait fait naître les plus belles espérances, sera généralement amoindrie, soit en raison de la coulure de la fleur sous l’influence des pluies printanières, soit par les altérations du fruit provenant de l’excès de l’humidité, soit enfin par l’impossibilité d’obtenir des cuvées convenables avec les raisins trop verts. Ce serait autant de motifs pour déterminer les habiles viticulteurs du midi à redoubler d’efforts et de soins dans la préparation de leurs cuvées et de leurs vins ; ils pourraient ainsi se soustraire à la fâcheuse nécessité d’envoyer le vin à la distillerie, car ils en trouveront un emploi bien plus productif, soit dans la consommation intérieure, pour rehausser la force et la couleur des vins faibles, soit dans l’exportation.

On a récolté en extrême abondance la plupart des fruits à noyau, particulièrement les cerises, les prunes et les pêches. À peine pouvait-on en général reprocher à ces fruits une saveur un peu affaiblie. D’un autre côté, si les fruits à pépin destinés à la table ont été obtenus en abondance, et de qualité souvent irréprochable, malgré des retards dans les époques ordinaires de la maturité, une grande quantité n’en a pas été moins atteinte par les diverses causes d’altération de l’humidité, et ils ont dû être prématurément cueillis et livrés à la consommation. Il n’en a pas été de même heureusement des fruits destinés à la fabrication du cidre, des pommes, dont les nombreuses variétés sont rangées en trois classes spéciales, suivant qu’elles sont douces ou sucrées, âpres ou acerbes, aigres ou acides, ainsi que des meilleures poires à cidre. La floraison luxuriante des arbres avait présenté des apparences qui n’ont pas été trompeuses. En certains vergers même, il a fallu soutenir avec des étais les rameaux des pommiers, qui rompaient sous le poids des fruits. les pays à cidre seront donc en 1860 doublement favorisés par l’abondance de leur récolte et par les débouchés plus faciles qui leur seront ouverts par suite d’une moindre concurrence du vin. Ceux même des propriétaires qui s’adonnent à la culture des meilleures variétés de poiriers à cidre trouveront peut-être un placement d’autant plus facile du poiré. En raison de sa limpidité, de sa blancheur, de sa force vineuse et de sa conservation, cette liqueur pourra, en de certaines occasions, être assimilée au vin blanc, si elle n’y est parfois mélangée à l’insu de l’acheteur.

En cherchant à établir les conditions principales de la production du