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faux en écritures de commerce et en écritures privées, la banqueroute frauduleuse, la contrefaçon de sceaux, poinçons et marques, les menaces par écrit et sous conditions. Enfin, dans la catégorie des individus d’instruction supérieure, les actes dénotent plus d’intelligence et de ruse pour s’approprier le bien d’autrui, car à côté des faux en écritures de commerce figurent les détournemens de fonds par des dépositaires publics, les faux en écritures authentiques, les soustractions d’actes et de pièces dans un dépôt. On voit aussi apparaître un genre d’attentat intimement lié au développement de l’instruction, les complots contre la sûreté de l’état.

Dans ces appréciations, qui, pour être tout fait définitives, auraient besoin d’être étendues à de plus longues périodes, on devra tenir compte d’une foule de circonstances accessoires qu’on a jusqu’à présent négligé de consigner. Nous avons parlé de l’influence de l’instruction combinée avec celle du climat ; il faudrait aussi prendre en considération celle de la race, ranger les prévenus par catégories de patrie et vérifier de la sorte le penchant relatif de criminalité que chaque individu doit aux conditions et au lieu dans lequel il a pris naissance. Il est incontestable que les hommes tiennent de leur sang une disposition plus ou moins prononcée à telle ou telle passion, à tel ou tel vice, et même, transportés dans d’autres climats que ceux où ils ont pris le jour, ils gardent, eux et leurs descendans, au moins pendant un certain nombre d’années, leurs penchans natifs. Comme vient encore de le montrer M. P. Mantegazza, l’influence de la race l’emporte sur les actions climatologiques pour la première génération d’émigrés sur une terre étrangère, d’où il faut conclure que la vie morale procède plus en certains cas des penchans dont on a hérité que des influences ambiantes. En certaines contrées, le fait a été déjà clairement mis au jour. Aux États-Unis, le révérend R. Everest a trouvé, par des évaluations contrôlées avec grand soin, que la proportion des criminels hommes de couleur libres, même en faisant la part de l’inégalité d’instruction et du degré de pénalité, était beaucoup plus forte que celle des criminels blancs.

Les cartes de criminalité par départemens qu’a dressées M. Guerry ne sont sans doute pas tout à fait concluantes, mais elles fournissent cependant un élément propre à déterminer l’influence des races comme celle des climats. Quand on voit qu’il a été commis dans la région du sud de la France un nombre de crimes double de celui qu’a présenté la région du centre, il est difficile de ne pas reconnaître un effet du genre de vie et des habitudes sociales. Quoi de plus frappant, par exemple, que le contraste qu’on remarque entre le département de la Corse, qui donne 1 accusé sur 2, 199 habitans, et le département de la Creuse, qui n’en présente que 1 sur 37,014 ? Au contraire, la plus grande somme de crimes contre les propriétés