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désormais être de mise dans la décoration de nos monumens ? La conclusion ne serait ni mieux motivée ni plus juste en ce qui concerne les modèles fournis par la statuaire antique et le profit à en tirer aujourd’hui. Ces modèles, on a le droit et le devoir de les imiter, mais à la condition d’en extraire la substance et la moelle même, au lieu d’en dérober seulement l’enveloppe et d’en transcrire les apparences. Les études de l’antique sont en un mot les humanités de l’art. C’est peu de n’y puiser que de simples leçons de calligraphie pittoresque ou des phrases toutes faites pour s’autoriser souvent à ne rien dire. Il faut y chercher mieux que cela ; il faut, à l’exemple de Simart, demander à ces études des secrets plus précieux et une correction moins vulgaire. Le sculpteur des bas-reliefs du tombeau de l’empereur s’est approprié, aussi bien que la correction du style, la pensée même, le goût, les saines habitudes de l’art grec. Son œuvre, à ce titre, mérite de figurer, sinon parmi les créations originales, du moins parmi les travaux les plus sérieux de notre temps. Qui sait même ? peut-être trouvera-t-on qu’il est plus malaisé et plus louable de renouer ainsi de hautes traditions que de se hasarder à la poursuite d’une forme d’expression nouvelle ; peut-être, au milieu des incertitudes et des fantaisies maladives qui tourmentent l’école contemporaine, le plus sûr est-il encore de se retrancher dans le passé, et, pour échapper à ce désarroi des croyances, de remonter jusqu’aux époques de foi unanime et de robuste tranquillité.

Dans cet examen des travaux de Simart, nous avons omis plus d’une œuvre qui se recommande pourtant, soit par son propre mérite, soit par l’importance de la tâche, soit enfin, — comme la restitution de la Minerve du Parthénon, — par un caractère et des procédés d’exécution exceptionnels. Nous n’avons rien dit ni d’une statue de la Poésie épique placée dans la bibliothèque du palais du Luxembourg, ni d’un groupe pour la salle du Trône dans le même palais, — l’Art demandant ses inspirations à la Poésie, — ni d’une figure allégorique, la Ville de Paris, pour le berceau du prince impérial : figure charmante, d’une expression toute maternelle, et dont le délicat sourire semble glisser des traits du visage sur les formes souples du corps et animer en quelque sorte jusqu’aux plis de l’ajustement. Si dignes qu’elles soient du sculpteur de l'Oreste, ces statues et plusieurs autres encore ne serviraient qu’à grossir la liste des travaux qu’a laissés Simart ; elles ne montreraient pas sous un jour nouveau un talent dont les spécimens que nous avons essayé d’analyser donnent suffisamment la définition et la mesure. Quant à la Minerve, les questions qu’elle soulève intéressent l’archéologie plus directement encore que l’art proprement dit, et ces questions ont été discutées ici même par un juge des mieux autorisés en pareille