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Wilhem s’y tiennent fidèlement, et que ceux qui, ayant charge d’écoles populaires, ne savent laquelle choisir se gardent bien de ne pas pratiquer celle de Wilhem. »

Les méthodes, expéditives pour apprendre toute sorte de sciences ne manquent pas du reste en France, et si la connaissance. des élémens de la musique, de l’harmonie et même de la composition ne se répand pas dans toutes les classes de la société, ce ne sera pas la faute des instituteurs qui, comme M. Halévy, se dévouent à cet ingrat labeur de l’enseignement. Nous avons précisément sous les yeux un Nouvel enseignement musical, ou Méthode pratique pour apprendre simultanément la lecture musicale, les accords et la composition. L’auteur de cet ouvrage ingénieux, M. Bernardin Rahn, n’a-t-il pas trop abusé de l’analyse et des subdivisions, et croit-il sincèrement que sa méthode pourrait être mise avec profit dans les mains d’un enfant sans la présence d’un maître qui guiderait son jeune esprit à travers le labyrinthe des définitions ? Je ne le pense pas. En général, ceux qui enseignent les élémens d’un art quelconque, particulièrement la musique, ne se préoccupent pas assez des inclinations de l’esprit des enfans, qu’il ne faut pas embarrasser avant l’heure des conséquences d’un principe posé. Le catéchisme commence par dire : Dieu a créé le ciel et la terre, sans prétendre expliquer comment cela s’est fait. Dites donc aux enfans immédiatement et absolument ce que vous avez à leur apprendre, et laissez au temps et aux leçons de chaque jour à faire le reste. La méthode ingénieuse et très scientifique de M. Bernardin Rahn prouve seulement qu’il est un excellent professeur, qu’on fera bien d’avoir recours à ses conseils et de le prendre pour guide du Nouvel enseignement qu’il vient de publier.

Le diapason légal, qui a été fixé l’année dernière par une ordonnance ministérielle, est déjà introduit à l’Opéra et au Théâtre-Italien, qui a fait sa réouverture le 2 octobre. Malgré la molle résistance des esprits routiniers et celle plus énergique des intérêts qui se trouvent lésés par cette réforme salutaire, l’application du nouveau diapason se fera dans tous les grands théâtres lyriques de l’Europe. Le gouvernement russe l’a introduit au théâtre italien de Saint-Pétersbourg. J’ai entendu dire dans le monde des artistes et des amateurs que la sonorité de l’orchestre de l’Opéra avait beaucoup perdu de son éclat depuis l’introduction du nouveau diapason. J’avoue, à ma honte, que je ne me suis pas aperçu de cet amoindrissement de la sonorité, que je trouve plutôt encore excessive, par rapport aux chanteurs qui se démènent sur la scène. L’abaissement du diapason était devenu une nécessité pour les théâtres lyriques, et en prenant l’initiative de cette réforme, l’autorité a rendu un véritable service à l’art, surtout à l’art de bien chanter. On peut lire dans un opuscule de M. Bénédit : Étude sur le diapason normal, ce que les théâtres de province ont eu à souffrir de l’extrême sonorité des orchestres qui écrasaient les pauvres chanteurs ; M. Bénédit, qui défend avec esprit dans un des principaux organes de la presse provinciale, le Sémaphore de Marseille, les saines idées de l’art, a réuni, en quelques pages vives, les meilleurs argumens en faveur du nouveau diapason, qui fera le tour du monde.


P. SCUDO.


V. DE MARS.