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courans d’eaux froides qui en reviennent, il est clair que toute la sphère humide doit participer à ce mouvement de translation et s’avancer vers le pôle en question, tandis que, dans le cas contraire, elle s’en éloignera. D’après les données recueillies par M. Julien, les masses tièdes du gulf-stream et du flot équatorial dépassent de beaucoup la quantité d’eau froide qui revient du nord par un courant à la surface. Au contraire, dans l’hémisphère sud, c’est le flot antarctique qui pénètre et refoule devant lui les eaux sur-échauffées des zones tropicales. C’est surtout à l’orient, où le vaste flot polaire se déroule entre l’Afrique et l’Australie, que les effets de la pression qu’il exerce sur les eaux chaudes et dilatées de l’Océan-Indien deviennent manifestes. Dans cette mer intertropicale, fermée au nord par des contrées brûlantes, la température s’élève au-dessus des limites connues dans la mer des Antilles et dans le golfe du Mexique. Le thermomètre centigrade y marque quelquefois plus de 30 degrés, et l’évaporation annuelle n’est pas évaluée à moins d’une vingtaine de pieds environ. Tout concourt donc à favoriser sur ce point la puissance des courans équatoriaux qui semblent destinés à se répandre dans diverses directions à la surface de l’Océan ; mais telle est la puissance du flot venu du pôle antarctique, que ces courans refoulés et comprimés ne peuvent se frayer un passage qu’en suivant les rivages des continens asiatique et africain.

On peut se demander comment ce retour graduel des eaux vers l’hémisphère boréal ne détermine pas une élévation sensible du niveau de nos mers. M. Adhémar explique ce fait par la transformation en glace du surplus des eaux chaudes affluentes sur les contre-courans d’eaux froides qui retournent vers l’équateur. À ses yeux toutefois, le mouvement de translation de l’Océan ne s’en produit pas moins, et celui de l’atmosphère le rend manifeste, car c’est par une plus grande quantité de vapeurs et de pluie qu’il doit commencer, et en effet il tombe une plus grande quantité de pluie dans la partie du globe qui est au nord de l’équateur que dans les régions situées au sud. L’étendue atmosphérique attirée par les glaces polaires entraîne nécessairement des masses considérables de vapeurs qu’ont aspirées des couches de vent sec au moment de leur passage au-dessus des mers équatoriales. La prédominance de l’humidité inondant les zones septentrionales du globe sous la forme de brouillards, de pluie et de neige, a dû rendre peu à peu ces contrées inhabitables antérieurement à l’avant-dernier déluge, et forcer les êtres qui y vivaient à se rapprocher des climats inter tropicaux.

Tel est l’ensemble des faits sur lesquels le mathématicien français établit son ingénieuse théorie. On a vu, par quelques-unes des réflexions consignées plus haut, qu’elle ne résout pas toutes les questions