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Cette tradition n’est pas d’ailleurs la seule des anciens âges qui ait rayonné de l’Asie occidentale en diverses directions. Plus on scrute, plus on analyse les mythes des Védas et de la Grèce, plus on reconnaît, dispersés en une foule de lieux, les élémens de cette histoire primitive transformés en légendes locales, défigurés par l’imagination et la poésie. Lors même cependant que la Bible ne ferait mention que d’un cataclysme local et circonscrit, il resterait à s’expliquer à quelle cause il était dû, car les termes des récits hébreu et chaldéen montrent qu’il fut encore assez étendu. On s’est donc adressé à la science pour savoir ce qu’il faut penser du déluge de Noé, afin d’en déterminer l’origine et les limites. Or l’examen des couches terrestres prouve que la terre a subi en une foule de points de sa surface divers cataclysmes. À différentes époques ont eu lieu de vastes submersions de continens, et plusieurs ont amené la destruction d’un grand nombre d’animaux. La difficulté est seulement de distinguer les vestiges qui se rapportent aux plus récentes. Longtemps on a désigné par l’appellation générique de diluvium toutes les alluvions qui appartiennent à l’âge géologique auquel succéda la période contemporaine, terrains formés de sable, de gravier, de cailloux roulés, disposés souvent par couches d’une manière irrégulière, et offrant des profondeurs fort inégales. Ce diluvium se rencontre dans toutes les parties du monde, et on le regardait d’abord comme déposé par le dernier cataclysme ; mais depuis qu’on a mieux étudié ces antiques alluvions, on y a reconnu des terrains d’âges différens, formés dans des conditions diverses, et l’on s’est pris à douter qu’ils eussent une origine commune. Aussi les appelle-t-on simplement aujourd’hui terrains quaternaires ou pleistocènes. On n’est pas plus édifié sur l’âge relatif des cavernes où de vastes courans paraissent avoir accumulé des débris d’animaux qui s’y trouvent associés et confondus, sans qu’il soit encore possible de décider si ces animaux ont été contemporains. Les brèches ou filons formés d’une sorte de ciment dans lequel sont engagés des fragmens de roche et des fossiles donnent lieu aux mêmes incertitudes. Bien des théories ont été proposées sur l’âge respectif de ces brèches osseuses et de ces grottes. Tout ce qu’il est possible d’affirmer, c’est qu’elles appartiennent les unes et les autres à l’époque quaternaire.

Ainsi, hors les traits généraux qui permettent de rapporter à une même période l’ensemble des dépôts produits après les terrains tertiaires les plus modernes, les géologistes ne s’entendent pas sur la succession des causes qui en ont amené la formation, encore moins sur la chronologie des divers dépôts. La science, en définitive, ne dit rien de positif touchant la date du dernier déluge, de celui qu’on peut appeler historique. On en a cherché la cause dans le soulèvement