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une quantité d’engrais équivalant à 100 quintaux de fumier de ferme par hectare chaque année[1].

Sur la taille de la vigne, bien des divergences d’opinions, se sont également manifestées. Il serait plus facile de se mettre d’accord en établissant les principes sur lesquels est fondée la méthode générale, et en tenant compte de la vigueur des ceps et de la fécondité du terrain. Le but principal de la taille consiste à restreindre l’étendue des rameaux, feuilles et fruits que la sève doit nourrir, afin que la nutrition se trouve relativement plus abondante et les fruits plus gros et plus succulens. On sait d’ailleurs que c’est sur la pousse annuelle de chaque bourgeon, (ou œil) que se développeront les feuilles, fleurs et grappes de l’année. Afin donc d’éviter une végétation trop étendue, par cela même épuisante, on retranche presque totalement les pousses de l’année précédente, ne laissant vers l’origine de chaque pousse que deux ou trois yeux ou bourgeons latens, sauf plus tard, par voie d’ébourgeonnage ou de pincement, à supprimer une partie des nouvelles pousses, trop étendues encore.

Vers l’époque de la formation des jeunes grappes et de l’épanouissement des fleurs se présentent tour à tour les chances les plus grandes des accidens qui menacent de diminuer ou d’anéantir la récolte. Ce sont surtout les pluies trop abondantes qui peuvent entraîner le pollen et empêcher ainsi la fécondation et la fructification, ce sont aussi les gelées tardives qui solidifient l’eau dont les tissus délicats de la fleur sont gorgés, écartent les cellules, désagrègent ces tissus et les frappent de mort[2]. Contre ces deux accidens très fâcheux, le même moyen est employé tous les ans avec grand succès par les habiles et soigneux horticulteurs de Thomery et de Fontainebleau. Dans cette dernière localité, pour la treille si renommée qui s’étend sur une longueur totale de 3, 500 mètres, et dont la hauteur dépasse 6 mètres, des auvens en bois posés sous le chaperon de la muraille font écouler les eaux pluviales au-delà des rameaux palissés qui portent les fleurs ; les mêmes auvens forment un écran qui suffit pour arrêter le rayonnement direct de la chaleur entre les organismes de la vigne et les espaces célestes toutes les

  1. Certains engrais, tels que les chiffons de laine et de soie, les râpures de corne, les os en poudre, d’une décomposition très lente, peuvent Être employés en proportions triples ou quadruples de la ration annuelle, une fois en trois ou quatre ans. Un des moyens de rendre à la terre en grande partie ce que la végétation annuellement lui enlève consiste à brûler les sarmens retranchés, les rafles et marcs de raisin, afin d’en répandre les cendres sur le sol ; mais il faut se rappeler en tout cas qu’un excès de fumure produit des raisins plus gros, plus aqueux et moins sapides.
  2. Ceci indépendamment des chances d’invasion des propagules de la maladie spéciale contre laquelle l’utile application du soufrage a été indiquée dans la Revue du 1er septembre 1856.