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dès qu’une légère pression déchire le faible tissu. Le jus se mélange alors en proportions variables avec les sucs plus particulièrement doués de l’arôme et de la couleur[1]. Quant à la rafle ou grappe (σταφυλή) dépouillée des fruits, elle se compose principalement des pédoncules ramifiés entre eux qui supportent les grains de raisin. Bien qu’elle ne contienne sensiblement ni sucre ni principes aromatiques, elle peut compléter utilement le goût et certaines qualités des vins soumis au cuvage, en leur communiquant une légère amertume due au tanin qu’elle renferme. Au reste, les proportions des principes sucrés, acidulés et aromatiques deviennent directement appréciables au goût vers l’époque de la maturité du fruit : c’est même sur ces diverses proportions que repose presque exclusivement la qualité des raisins de table ; les autres principes, beaucoup moins sapides ou moins aisément discernables à l’odorat, contribuent à développer les propriétés nutritives du raisin.

C’est plus particulièrement aux quantités de matière sucrée (glucose) contenue dans leur suc que les raisins destinés à la fabrication de l’alcool ou esprit-de-vin doivent leur valeur réelle, car la quantité d’alcool qu’ils fournissent est proportionnée à la dose du sucre qu’ils renferment. Il en est autrement des variétés plus nombreuses destinées à la fabrication du vin et des eaux-de-vie fines, variétés choisies que l’on propage par voie de grande culture dans certaines régions viticoles. Ce n’est certainement pas à l’aide de la simple dégustation que l’on pourrait fixer le choix à cet égard, car

  1. Nous venons de désigner les substances organiques, colorantes, aromatiques, astringentes, azotées, grasses et salines renfermées dans le tissu qu’on rencontre immédiatement sous l’enveloppe épidermique du raisin. Pour compléter l’indication de la composition chimique du fruit, nous devons ajouter les principes contenus dans la masse globuleuse sous-jacente : ce sont, outre l’eau qui les tient en dissolution, la glucose, douée de la saveur douce et sucrée, les acides pectique, malique, le bitartrate et le racémate de racemus, grappe de raisin de potasse, concourant tous à développer la saveur acidulée du fruit ; l’albumine, qui joue un rôle utile dans l’alimentation des hommes et sert à nourrir le ferment, principe latent aussi renfermé dans le raisin ; des substances grasses ; enfin différens sels. Les iodures par exemple se rencontrent en plus fortes proportions dans les vins des contrées maritimes, notamment des vignobles de l’île de Ré et de La Rochelle. Le goître étant inconnu dans ces contrées et généralement sur tout le littoral des mers, on en a conclu que, pour faire disparaître cette affection, il faudrait faire usage dans les localités où elle règne d’alimens et de boissons aussi riches en iode ou sels iodurés que les substances alimentaires généralement en usage dans les pays plus favorisés.