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Se plaint comme un agonisant,
Et la feuille au loin tourbillonne.
— Allons ! passons notre chemin…
Adieu, maison ! adieu, jardin !
— Un bon souvenir est encore
Ainsi qu’un ami sans pareil,
Ou comme un rayon de soleil
Où l’amertume s’évapore !

Mettez à côté quelque gaie chanson, comme la Ronde de l’Oiseaun ou la Grand’Pinte elle-même, et vous aurez, sinon un faisceau de grande et haute poésie, du moins un gracieux bouquet de dernière saison. C’est la finesse et la fraîcheur dans la gaieté ou dans l’émotion simple. Les vers de M. Auguste de Châtillon ont pour eux cet avantage qu’ils sont l’œuvre d’un art délicat, et qu’ils ont quelques reflets de cette originalité devenue si rare dans la poésie légère aussi bien que dans un ordre d’inspirations plus sérieuses.

Il est un mot fait toujours pour porter bonheur à ceux qui le prononceront, c’est ce sursum corda des âmes jeunes qui ne désespèrent pas, qui portent en elles-mêmes la bonne volonté de l’art, l’instinct de ce qu’il y a de plus élevé dans la poésie, et c’est ce mot que redit M. Edmond Py en résumant l’esprit de ses vers dans cette double parole inscrite à la première page d’un livre nouveau : Foi et Patrie. M. Edmond Py est jeune encore, et il n’a point sans doute cette expérience du talent maître de lui-même, toujours habile à choisir et à diriger son inspiration. Ses vers ont cependant un accent généreux qui plaît, qui tient a la nature même des sujets familiers à ce jeune esprit. L’auteur aime d’un amour intelligent et sincère tout ce qui est vrai et juste, tout ce qui peut faire battre le cœur en l’élevant, — la religion maternelle, la patrie, la famille, la beauté dans l’art. L’idée de l’un de ses principaux fragmens n’est pas sans élévation. Dans sa poésie, l’auteur de Foi et Patrie a voulu représenter en quelque sorte l’attitude de l’âme humaine en face de la mort, sous la triple influence de l’impassibilité stoïque, de l’amour du plaisir et du sentiment chrétien : Caton, Cléopâtre et Jésus passent successivement, comme dans une vision, devant le vieil homme que rien ne satisfait d’abord, et qui ne finit par être subjugué qu’au spectacle du juste exalté et purifié par le sacrifice. Concevoir de telles idées, ce n’est pas tout : il faut leur donner la forme de l’art, l’enveloppe poétique, et M. Edmond Py a le mérite de l’avoir tenté, d’avoir trouvé des développemens souvent heureux. Une chose est à remarquer dans ce livre d’une honnête et sincère inspiration, c’est que l’auteur, dans l’ardeur de ses croyances religieuses et dans ses