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une réminiscence de leur ancien régime démocratique. Il y a cependant plusieurs familles qui ont acquis, par des services de guerre ou leurs richesses, une prééminence incontestée, que la hiérarchie militaire concourt à maintenir. À la tête de chaque corps d’armée est l’ataman (nakaznyi ataman), grade qui correspond à celui de lieutenant-général, et dont est revêtu un officier toujours envoyé de Russie. Sur l’échelle hiérarchique viennent se placer le colonel et le lieutenant-colonel, le major (voïskovoï starschina), l’iessaoul (capitaine), le sotnik ou centurion (lieutenant), le khorounjii (enseigne) et l’ouriadnik (sergent). Les grades supérieurs, autrefois électifs et temporaires, sont maintenant conférés directement par l’empereur et à vie. Une restriction analogue a été apportée à la collation des grades inférieurs et de tous les emplois civils. Les Cosaques seuls peuvent y être appelés, mais le choix et la nomination dépendent des autorités russes. Ce changement est un de ceux qui ont modifié le plus profondément l’état de l’ancienne société cosaque. Le pouvoir des chefs, toujours disputé, toujours instable, et par cela même faible et incapable de comprimer les dissensions intestines, a été remplacé par une autorité régulière, qui fait sentir son frein ; mais ce sentiment de sauvage indépendance, mobile pour ces peuples de tant d’entreprises d’une audace inouïe, s’est éteint : il a fallu apprendre à plaire à un maître, de qui découlent tout droit et toute grâce, et, pour donner plus de force à cette influence venue d’en haut, le titre d’ataman-général a été dévolu au tséçarévitch, héritier présomptif du trône.

Tout Cosaque naît guerrier ; il possède comme colon le sol qu’il cultive et qu’il doit défendre. C’est un véritable fief, exempt de toute redevance en nature ou en argent, et assujetti seulement au service militaire, que le tenancier doit à son souverain depuis l’âge de vingt ans jusqu’à soixante. Sur ces quarante années, vingt-deux appartiennent au service actif, les autres au service de vétérance. Chaque homme doit se pourvoir de son cheval, de son habillement et de ses armes ; ce n’est que lorsqu’il est requis pour une expédition lointaine que la couronne lui accorde une solde et des rations. M. de Haxthausen limite à une période de quinze ans, de l’âge de vingt-cinq à quarante, la durée du service actif, et de quarante à soixante celui de la vétérance. Koch, comme M. de Gilles, fait commencer le service actif à vingt ans. Si ce dernier cas est la règle au Caucase, il se peut qu’elle varie dans les autres colonies, sur le Danube, le Don, le Volga, l’Oural et dans la Sibérie.

Quelques privilèges dont jouissent les Cosaques peuvent être considérés comme un vestige de leur self-government d’autrefois : ils ont le droit de régler entre eux leurs affaires communes ; ils sont