Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 27.djvu/721

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

circonstances lui feront précisément préférer tel ou tel système de culture. Le propriétaire de bois doit agir de même ; il lui serait parfaitement inutile de connaître les différentes méthodes d’exploitation, les procédés de plantation les plus expéditifs, s’il ignorait d’ailleurs l’espèce de produits qu’il lui importe de créer, le choix des essences à propager. À opérer ainsi au hasard, il risquerait fort, malgré tous ses soins, d’avoir fait une mauvaise spéculation, et de se trouver finalement en perte.

Le point capital dans l’exploitation d’une forêt est la détermination de l’âge auquel les arbres doivent être abattus. En agriculture, l’époque de la récolte est déterminée d’une manière invariable par la maturité des produits de la terre. Un retard dans la moisson ne présente aucun avantage, et n’est au contraire jamais que préjudiciable. Pour les forêts, il n’en est pas de même. Dès l’âge de dix ans, les arbres peuvent être exploités et livrés au commerce ; mais, loin de se détériorer en restant sur pied, ils prospèrent jusqu’à deux cents ans et plus, augmentant chaque année de volume et de qualité. Entre ces deux limites extrêmes, quel est le moment précis où l’exploitation est la plus avantageuse pour le propriétaire, celui où elle répond le mieux aux besoins de la consommation ? Et ce point déterminé, vaudra-t-il mieux exploiter la forêt en une seule fois, sauf à rester ensuite pendant de longues années sans rien en retirer, ou bien sera-t-il préférable de pratiquer des coupes de manière à obtenir une production uniforme et continue ? L’étude de ces questions, qu’il importe tout d’abord de trancher, avant même de faire tomber un seul arbre sous la cognée, constitue la partie de la science forestière qu’on appelle l’aménagement des forêts. Au point de vue pratique, elle donne lieu à une opération qui a pour but de régler les exploitations dans le plus grand intérêt des propriétaires.

Suivant qu’elles appartiennent à des particuliers, à l’état ou à des communes, les forêts ont des exigences différentes à satisfaire, et ne sauraient par conséquent toujours être soumises au même régime. C’est l’analyse des principes qui doivent présidera l’exploitation en ces diverses circonstances que nous allons entreprendre ici. Elle présente du reste une opportunité toute particulière. Dans un document officiel d’une haute importance, relatif à l’exécution des grands travaux publics, on place en première ligne le reboisement des montagnes et le défrichement des plaines. Un projet de loi soumis au corps législatif a suivi de près cet appel à la sollicitude ministérielle. Si nous voulons éviter tout mécompte et recueillir de ces opérations tout le fruit qu’on est en droit d’en attendre, il importe de bien connaître les conditions dans lesquelles la production forestière est la plus profitable eu égard à la qualité du propriétaire.