Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 27.djvu/506

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

également le chemin que commence à faire la question soulevée ici, il y a quinze jours, touchant le droit de discussion par la presse des opinions émises par les députés dans les délibérations du corps législatif. Un honorable député, M. Emile Ollivier, a écrit à ce propos une lettre à un journal, et interprète la loi comme nous l’avons fait nous-mêmes. Que d’autres jurisconsultes de nos assemblées suivent cet utile exemple, et leurs explications, nous n’en doutons pas, viendront à bout de la timidité immodérée de la presse. Comptons encore et surtout, parmi les rares bonnes fortunes qui échoient au libéralisme français, la publication du quatrième volume de l’Histoire du Gouvernement parlementaire de M. Duvergier de Hauranne. Dans ce beau livre, qui révèle aux générations actuelles les glorieux efforts qu’ont faits leurs devancières pour fonder en France la liberté politique, M. Duvergier de Hauranne, avec cette foi persévérante qui anime et vivifie son remarquable talent, recueille un trésor d’expérience que, plus heureux que nos pères, nous saurons dans un meilleur temps mettre à profit.

La question suisse est bien effacée par les nouvelles proportions que les événemens sont en train de prendre en Italie. Elle ne se réduit plus guère, pour la Suisse, qu’à savoir s’il y aura ou s’il n’y aura pas de conférence, ou, pour mieux dire, si la Suisse sera relevée par les puissances signataires du traité de Vienne des devoirs que lui assignait la neutralisation des districts savoisiens. Une brochure, qui a pris pour titre la Conférence et qui résume avec précision la thèse soutenue par la Suisse dans ce débat diplomatique, ramène à peu près la question à ces termes. C’est ainsi que nous avions compris nous-mêmes l’attitude prise par la confédération helvétique, et il nous avait paru d’une bonne politique d’entrer avec modération dans les raisons sérieuses présentées par nos voisins. La Suisse, ayant reçu de l’Europe la sanction de sa neutralité, se considère comme investie d’un mandat européen pour le maintien des conditions attachées à cette neutralité. Elle croit que la neutralisation des provinces savoisiennes faisait partie de ce mandat, et elle n’a pas pensé pouvoir y renoncer sans recourir à ses mandans, c’est-à-dire aux signataires du traité de Vienne, et sans avoir obtenu soit une nouvelle interprétation, soit l’abrogation de la partie de ses obligations qui était relative à la Savoie. Cette affaire sera-t-elle terminée par une conférence ? Le gouvernement français n’aurait pas d’objection, croyons-nous, à ce procédé. La difficulté vient plutôt de l’Autriche, qui s’opposerait à l’admission du Piémont dans la conférence. En attendant, les Suisses s’aperçoivent qu’ils ne peuvent compter sur l’appui chaleureux d’aucune grande puissance. M. Dapples, leur envoyé en Prusse, quitte Berlin et n’emporte aucun encouragement ; il se rend à Pétersbourg, où il n’en rencontrera pas davantage. Le langage, de lord John Russell au parlement a aussi refroidi les Suisses. Les esprits se modèrent dans la confédération ; on dit même que M. Frey-Hérosé, que le parti extrême voulait pousser à publier une nouvelle proclamation, s’y est refusé.

Que faites-vous, ma sœur ? demandait, il y a longtemps, à l’Allemagne un