Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 26.djvu/70

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

1,200,000 tonnes de houille par an et 210,000 tonnes de fer. D’autre part, les besoins du trésor exigeraient peut-être qu’on relevât les droits de douane, qui, malgré des tarifs libéraux, restent stationnaires. En 1855, on les évaluait à 19 millions de florins : ils descendent à 16 en 1857, et on les retrouve en 1858 au même chiffre de 19 millions.

La différence qui est signalée dans la balance de l’exportation avec l’importation au profit de cette dernière fournit un nouvel argument à l’appui d’un remaniement de taxes dans un sens plus protecteur. Le déficit pèse d’un poids d’autant plus lourd à cette occasion, que le consommateur autrichien fait plus de sacrifices pour solder les marchandises étrangères. La question du papier-monnaie produit en Autriche un résultat singulier. Dans tout l’intérieur de l’empire, l’emploi de ce papier date de si loin, est tellement entré dans les habitudes du public, que les variations du change ne se font pas sentir. Quand le florin tombe de 2 fr. 50 c, prix nominal, à 2 francs et au-dessous sur les places étrangères, les objets de première nécessité, les denrées de production indigène par excellence, n’augmentent pas de prix ; les salaires restent les mêmes. Par conséquent les produits que l’Autriche pourrait exporter en plus grande quantité, c’est-à-dire les blés de ses provinces de l’est et du sud, les soieries, les vins de Hongrie, ne procurent pas à l’intérieur un revenu plus élevé en raison de l’agio ; mais cet agio au contraire accroît d’autant le prix de tous les objets importés de l’étranger, et ajoute un nouveau déficit à celui que donne la balance du commerce[1].

N’abandonnons pas ce sujet sans mentionner un des griefs les plus sérieux des populations, à savoir les résultats du monopole du tabac. Quand après 1848 le gouvernement a établi ce système en Hongrie, où la culture était libre, il a pris l’engagement d’acheter toute la récolte. Les propriétaires, redoutant la régie, ont commencé par cultiver peu ; encouragés par le gouvernement et sous le coup de mauvaises récoltes en blé, ils ont tellement augmenté le nombre des terres destinées au tabac que l’administration, de 130,000 yochs, l’a réduit à 80,000, en indemnisant le cultivateur à raison seulement de 20 florins par yoch supprimé. En outre, l’état fixe lui-même

  1. Nous pouvons donner de ce fait un exemple frappant. La société des chemins de fer autrichiens a conquis par un article de ses statuts le privilège de relever ses tarifs à mesure que le change augmenterait. Pendant la dernière guerre, elle n’a pu user de ce droit qu’en partie. Malgré la perte sur le change, elle ne payait ses ouvriers et ses travaux qu’avec la même quantité de papier, et la surélévation du prix des transporta soldés en papier-monnaie constituait pour le public une aggravation de dépenses qu’il fallut limiter, comme pour la compagnie un très réel bénéfice.