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et à la sécurité de la France. L’Italie nouvelle trouvait commode, et nous n’en sommes pas surpris, de prolonger à son profit cette protection armée de la France, qui lui a permis de s’affranchir du joug autrichien : pour elle, la continuation indéfinie de cette protection était en quelque sorte la promesse que nous ferions encore la guerre au besoin, et jusqu’à un certain point une excitation aux entreprises rêvées ou préparées par le patriotisme italien. L’Italie voulait donc nous garder comme son auxiliaire militaire, et si l’on eût laissé aller les choses comme on l’a fait depuis huit mois, elle ne nous aurait pas de si tôt rendu notre liberté d’action. Nous n’avons pas besoin de dire qu’une telle situation prolongée n’était pour la France ni digne ni sûre : elle n’était pas digne, puisqu’elle nous ravissait une portion de notre libre arbitre et de notre initiative ; elle n’était pas sûre, puisqu’elle nous exposait à une guerre fortuite, et à une guerre qui pouvait devenir générale. Si l’Italie était peu disposée à nous dégager de ses affaires, l’Europe elle-même ne paraissait pas fort en train de nous donner la main pour nous en retirer. L’Europe semblait dire à notre gouvernement : Ce n’est pas nous qui vous avons poussé en Italie, c’est même malgré nous que vous y êtes entré. Sortez comme vous pourrez des difficultés que vous vous êtes créées. Nous n’examinerons pas si cette abstention malicieuse de l’Europe était fondée ou non sur des motifs légitimes, si elle n’avait pas aussi pour cause l’impossibilité de s’entendre à cinq, dans le conflit des principes contraires, sur un arrangement tolérable de l’Italie. Nous exposons simplement le fait : il est apparu dans toute sa rigueur lorsqu’après avoir renoncé à la politique de Zurich, notre gouvernement s’est retourné vers l’Angleterre. Certes l’attachement du cabinet britannique à la cause de l’indépendance et de la liberté italiennes n’est point suspect : cet attachement pourtant n’a pas été assez fort pour vaincre la neutralité anglaise. L’Angleterre n’a pas voulu entrer avec notre gouvernement, par rapport aux affaires d’Italie, dans un engagement analogue à celui qu’elle avait conclu en 1834 avec le gouvernement du roi Louis-Philippe pour les affaires d’Espagne et de Portugal. Elle n’a pas voulu se lier à nous par un traité politique : elle nous a concédé, pour employer un des mots comiques de ce temps, une alliance virtuelle, et cette alliance virtuelle a pris la forme du traité de commerce et des quatre propositions. C’était quelque chose que ces quatre propositiond, et nous en avons usé sans perte de temps ; mais au demeurant l’Angleterre nous laissait en tête à tête avec l’Italie. C’était à nous de prendre, dans l’isolement, notre parti et de poser seuls la limite de nos engagemens vis-à-vis du nouvel ordre de choses établi dans la péninsule.

C’est, nous le répétons, cette résolution d’en finir que nous voyons avant tout dans le discours impérial et dans les dernières productions de notre chancellerie. Il y a là un acte de volonté auquel, avant même d’en examiner la forme, nous attachons un prix infini. Qu’on observe que depuis huit mois c’est le défaut de volonté qui est la plaie de l’Europe. Tout le monde a