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Lyonnais, des comtés de Valence et de Die, etc.[1], qu’il avait enlevés à l’empire. »

Lorsque son armée fut en état d’entrer en campagne, elle franchit de nouveau les Pyrénées au cœur de l’hiver. L’empereur s’était transporté lui-même de Valladolid à Pampelune et de Pampelune à Vittoria. Son projet était de se jeter en Béarn, de se diriger de là vers Toulouse et de pénétrer en Languedoc. C’était un peu tard pour concourir à l’invasion déjà manquée de 1523, et trop tôt pour seconder l’invasion encore impossible de 1524. Aussi son armée ne suivit point cette marche. Ne pouvant contribuer à l’exécution d’un plan général en ce moment renversé, elle agit à part de la coalition, mais dans l’intérêt particulier de l’Espagne. Commandée par le connétable de Castille, qui en était le capitaine-général, elle entra en France, où elle commit de grands ravages, Elle s’avança jusqu’à Sauveterre, qu’elle prit et rasa. Elle s’empara de vive force de la ville et du château de Bidache, qu’elle brûla. Ostariz eut le même sort, que subit aussi Saint-Jean-de-Luz, après que cette armée dévastatrice se fut retirée de devant Bayonne, qu’elle avait eu l’intention d’assiéger. Le dégât que les Français avaient fait eux-mêmes autour de cette ville aurait exposé à la famine les troupes qui se seraient hasardées à y mettre le siège. N’ayant ni le moyen ni l’espoir de s’emparer de la place forte qui ouvrait la France de ce côté, Charles-Quint songea à reprendre la ville de Fontarabie, que les Français occupaient depuis plusieurs années et qui leur était un pied à terre en Espagne. Vers le commencement de février, son armée parut devant cette place, qu’il investit aussi par mer. Une artillerie des plus formidables, composée de soixante pièces de gros calibre, la foudroya, et fit bien vite taire ses canons et tomber ses défenses. Menacée d’être prise d’assaut, la garnison capitula ; elle rendit la ville, d’où elle sortit librement, vie et bagues sauves, mais en laissant l’artillerie et les munitions au pouvoir de Charles-Quint. Après avoir recouvré Fontarabie et être ainsi rentré en possession de tout son royaume d’Espagne, l’empereur licencia la plus grande partie de ses soldats, que les rigueurs du temps et la disette de vivres sur cette frontière l’empêchèrent de tenir plus longtemps en campagne[2]. Il les renvoya, comme s’il n’avait pas projeté de faire entrer l’armée d’Italie en Provence aussitôt qu’elle aurait rejeté les

  1. Lettre de Charles-Quint à l’archiduc Ferdinand, du 16 janvier 1524, dans Lanz, Correspondens des Kaisers Karl V., t. Ier, p. 80 à 83.
  2. Lettres de Charles-Quint, du 2 mars 1524, à l’archiduc Ferdinand et au vice-roi de Naples Charles de Lannoy, auxquels il raconte les mouvemens de son armée, le siège et la prise de Fontarabie, et les causes de la rentrée de ses troupes en Espagne. Dans Lanz, p. 95 à 98.