Page:Revue des Deux Mondes - 1860 - tome 25.djvu/738

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sur cette suppression des traités particuliers, aujourd’hui légalement consommée depuis près de deux ans, attendu que la confusion qui règne à l’égard du vocabulaire commercial des chemins de fer, chez les nombreux écrivains qui s’occupent journellement des transports à prix réduits, tendrait à faire croire que ces traités existent encore. Les tarifs, il ne faut pas le perdre de vue, ne s’adressent qu’à des collections d’expéditeurs. Le tarif spécial convie simplement le public, s’il ne préfère payer les taxes du tarif général, à jouir de la réduction de prix consentie par la compagnie concessionnaire aux conditions qui lui assurent la compensation des sacrifices qu’elle s’impose.

Pendant vingt ans, de 1838 à 1858, il n’en avait point été ainsi : le cahier des charges des concessions de chemins de fer reconnaissait aux compagnies le droit d’accorder à un ou plusieurs expéditeurs une réduction sur les tarifs approuvés. La compagnie n’était pas tenue, comme pour un tarif général ou spécial, de demander à l’administration une autorisation préalable; elle n’était obligée qu’à lui en donner connaissance avant de mettre cette mesure à exécution, et l’administration conservait simplement le droit de déclarer cette réduction, une fois consentie, obligatoire vis-à-vis de tous les expéditeurs, sans distinction aucune. Tel était le régime des traités particuliers, devenus bientôt si impopulaires que le gouvernement dut les supprimer. L’administration, par suite de l’abandon qu’elle avait cru devoir faire, pour ce seul cas, de sa prérogative d’homologation, la justice par la divergence de ses décisions, les compagnies enfin, à raison des inconvéniens que présentaient certaines conditions de ces traités, ont également contribué à ce résultat, d’ailleurs peu regrettable.

Au fond, les compagnies pensaient bien avoir le droit de consentir un traité particulier à un expéditeur isolé, et parce que tel était leur bon plaisir; mais elles n’ont jamais osé prétendre officiellement à ce droit. Elles ont immédiatement suivi l’administration, au moins en apparence, sur le terrain où celle-ci les appelait, celui de la perception des taxes faite indistinctement et sans faveur, comme le prescrit formellement le cahier des charges. Elles regardaient tout expéditeur acceptant les conditions d’un traité particulier comme appelé, ipso facto, à jouir de la réduction de prix et des avantages que cette convention stipulait. D’autre part, l’administration, obligée à veiller avec sévérité à ce que la communication de tous les traités particuliers lui fût régulièrement faite, avait fini par organiser en 1852 un système de publicité garantissant aux expéditeurs la connaissance des traités particuliers qui les intéressaient et leur permettant dès lors d’en réclamer le bénéfice. L’administration, après avoir renoncé à ce droit d’homologation