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DE
LA METAPHYSIQUE
ET DE SON AVENIR

La Métaphysique et la Science, ou Principes de Métaphysique positive, par H. Étienne Vacherot.



Un des faits les plus graves qui ont marqué ces trente dernières années, dans l’ordre intellectuel, est la cessation subite de toutes les grandes spéculations philosophiques. Je ne sais si depuis le moyen âge le même phénomène s’est produit avec un caractère aussi frappant. Descartes, dans la première moitié du XVIIe siècle, succédait à un mouvement d’une prodigieuse activité, et dont le défaut avait été bien plutôt la présomption que la réserve. Le cartésianisme, Leibnitz, Locke, l’école française, remplissent la fin du XVIIe et tout le XVIIIe siècle, sans que le découragement se fasse jour dans cette succession continue de systèmes rivaux. Quand les dernières conséquences du cartésianisme et du sensualisme ont été tirées, et que le scepticisme de Hume a paru un moment en recueillir l’héritage, l’Écosse avec son honnête droiture, l’Allemagne avec sa profondeur d’esprit et sa pénétration, relèvent la pensée européenne épuisée et posent un nouveau point de départ pour la pensée. On sait la brillante évolution que l’Allemagne pendant plus d’un demi-siècle a exécutée devant le monde, étonné de tant de dons nouveaux, de ce langage étrange et attachant, de cette vigoureuse originalité qui faisait revivre sous le ciel