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étaient si simples, il redoutait si vivement la responsabilité et se défiait tellement de ses forces, qu’il refusa longtemps la proposition de M. Quincy. On parvint pourtant à vaincre ses scrupules, et il transporta ses instrumens à Cambridge ; sur la maison qu’on lui donna fut élevé un dôme mobile. En 1837, l’observatoire était terminé ; on y installa une lunette des transits, un télescope réflecteur de cinq pieds, deux télescopes à réfraction de 46 pouces, une aiguille d’inclinaison magnétique de notre constructeur français Gambey et trois magnétomètres de Lloyd, destinés à la mesure des élémens variables du magnétisme terrestre. Ces derniers instrumens sortaient des ateliers où l’on avait construit tous ceux qui servent aux observations faites dans le grand réseau magnétique anglais, qui comprend Greenwich en Angleterre, Toronto au Canada, l’île Sainte-Hélène, l’observatoire du Cap de Bonne-Espérance, ceux de Bombay, de Madras, de Singapour et de Hobart-Town dans l’île de Van-Diémen.

L’élan donné à la science astronomique et à la météorologie dès l’arrivée à Cambridge de M. Bond eut les plus heureux résultats. En 1825, M. John Quincy Adams, étant président de la république, avait demandé au congrès d’établir un observatoire national, et comparait avec regret la situation des États-Unis sous ce rapport à celle de l’Europe, où l’on ne comptait pas moins de cent trente observatoires, tandis que l’Amérique n’en avait aucun. La proposition du président ne trouva aucun écho ; mais après l’installation de M. Bond à Cambridge, le congrès, convaincu, quoique un peu tard, de l’utilité de la science astronomique, décréta en 1842 l’établissement d’un observatoire national à Washington. Malgré l’importance de cet observatoire, Cambridge est demeuré et restera sans doute encore longtemps le véritable centre des études astronomiques aux États-Unis.

Le premier observatoire de M. Bond, établi dans une maison particulière, était tout à fait insuffisant ; il ne possédait ni instrument parallactique ni micromètre de précision. En 1843, une magnifique comète excita vivement la curiosité des habitans de la Nouvelle-Angleterre, et les astronomes de Cambridge ne purent l’observer qu’avec des instrumens insuffisans. Le public intelligent de Boston reconnut la nécessité de faire quelques sacrifices pour donner à l’observatoire de l’université les grands instrumens désormais nécessaires aux études astronomiques. Une souscription destinée à l’achat d’un grand télescope eut bientôt couvert la somme de 100,000 fr. Il fut décidé qu’on achèterait un télescope à réflexion, monté comme ceux de Poulkova et de Dorpat, et l’exécution en fut confiée à MM. Merz et Malher, de Munich, les habiles successeurs de Fraünhofer.