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LA
SEINE MARTIME

I.
LE HAVRE
REGIME HYDRAULIQUE DE L'EMBOUCHURE DE LA SEINE.




Omnia in mensurà et numero et pondere
     disposti.
(SAP., XI, 21.)



Lorsqu’après une longue persistance des vents d’est les vents d’aval[1] commencent à prendre le dessus dans la Manche, leurs premières bouffées sont saluées sur les eaux de cette mer par un long frémissement de joie, et comme les abeilles qui, chargées du butin de la journée, volent de tous les points de l’horizon vers la ruche où le repos les attend, les équipages qui luttent péniblement au large ou se morfondent dans les abris du canal tendent leurs voiles et cinglent vers l’embouchure de la Seine. D’abord épars sur la vaste étendue de la mer, les navires se groupent à mesure qu’ils se rapprochent du but commun. L’atterrage leur est au loin signalé par le brusque affaissement des falaises du pays de Caux. Les escarpes éclatantes de blancheur que les érosions de l’Océan ont taillées de la vallée de la Somme à celle de la Seine dans le plateau crayeux expirent au cap de La Hève, et le talus de leurs éboulemens

  1. Ce sont, dans le langage des marins, ceux qui soufflent de la pleine mer vers la terre.