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UN ROMAN
D’AMOUR PURITAIN

The Minister’s Wooing, by H. Beecher Stowe ; 1 vol. in-8o  », London, Sampson Low et C°.



Un début trop heureux a ses dangers en même temps que ses douceurs. La séduction du succès est si forte, qu’un auteur qui vient de réussir appréhende de tenter une voie nouvelle. Quand il a devant lui une route toute tracée où il est certain de marcher d’un pas ferme et bien assuré, pourquoi s’aventurerait-il sur un terrain inconnu ? Il croit avoir devant lui une mine inépuisable, et il ne s’aperçoit point que son esprit est invinciblement ramené dans le cercle de ses conceptions premières. Comme un peintre qui recopierait sans cesse le même tableau, en changeant les ajustemens et les accessoires, il reprend un à un les mêmes personnages, il établit laborieusement des nuances dont il mesure l’importance à la peine qu’elles lui ont coûtée, et il s’imagine avoir tracé des caractères nouveaux, lorsqu’il nous a donné le décalque à demi effacé de figures déjà connues. C’est ainsi que nous avons vu des romanciers, d’ailleurs hommes d’esprit et d’imagination, nous raconter infatigablement, en vingt volumes différens et semblables tout à la fois, les exploits du même capitaine Fracasse, les ruses des mêmes sauvages, les fourberies des mêmes courtisanes.

On a pu craindre cet écueil pour Mme  Beecher Stowe. Dred n’était à beaucoup d’égards qu’une contre-épreuve de l’Oncle Tom[1].

  1. Voyez sur l’Oncle Tom et sur Dred la Revue du 1er octobre 1852 et du 1er novembre 1856.