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obtenir une année plus tôt qu’avec l’ensemencement, c’est-à-dire au bout de deux ou trois ans, la première récolte, qui, devenant d’année en année plus productive, atteint son maximum au terme d’une période de cinq ou six ans. Que l’on adopte l’une ou l’autre méthode, on doit préférer la disposition en quinconce, à distance de 1 mètre 60 centimètres à 2 mètres, qui facilite les soins de la culture et de la récolte. Une plantation de cafiers bien disposée peut donner des produits pendant quarante ans.

Les curieux et charmans phénomènes de la floraison et de la fructification amènent une autre série de travaux. C’est vers le mois de septembre que se manifestent les premiers signes de la maturité. Aussitôt qu’une teinte brune succède à la belle coloration rouge des fruits du cafier, on procède à la récolte, qui se prolonge jusqu’en janvier. Durant cinq mois, les nègres passent chaque jour entre les rangs de cafiers, choisissent les fruits mûrs et les rassemblent dans un panier de liane. Chaque travailleur récolte ainsi de 80 à 90 kilos de café en cerises dans le cours d’une journée. Chaque jour aussi, et pendant toute la durée de la cueillette des fruits, il faut s’occuper de la préparation et de la conservation des grains ou fèves. Les anciennes méthodes consistent soit à laisser macérer et fermenter en tas les cerises mûres, afin de faciliter l’extraction de la pulpe, soit à froisser ou grager, immédiatement après la récolte, les baies entre des cylindres en bois garnis de râpes métalliques, et à transformer la pulpe en une espèce de bouillie que l’on élimine par des lavages et triturations multipliés. La première méthode rend impossible de prévenir les irrégularités des fermentations, qui développent souvent des produits putrides, à ce point que certains cafés du commerce exhalent constamment une odeur nauséabonde plus ou moins prononcée. La seconde méthode a aussi des inconvéniens graves. Ainsi l’on est exposé à perdre, avec-les eaux de lavage, une partie considérable des principes immédiats qui constituent l’arôme si caractéristique du café. Puis, si les grains lavés ne sont pas soumis à une assez prompte dessiccation, ils ne tardent pas à offrir une coloration spéciale qui annonce la décomposition des deux substances préexistantes dans le café normal[1]. Enfin, des fermentations spontanées, — alcooliques, acides et putrides, — peuvent survenir, moins actives que dans le premier cas, mais toujours au détriment de l’arome du produit. Quoi qu’il en soit, dépouillés de leur pulpe par l’une ou l’autre méthode, les fruits sont conservés, après dessiccation plus ou moins parfaite, à l’abri de l’humidité,

  1. L’acide colorable en vert appelé acide chloroginique, et le sel double naturel que forme la combinaison de cet acide avec la potasse et la caféine.