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sance contourne ces têtes de collines et en est constamment dominée, de manière que les extrémités de ces hauteurs, les ongles de la main, pour continuer la comparaison, constituent autant de fortes positions où l’artillerie enfile toujours la route, et en plusieurs endroits la prend en écharpe. Le village de Montebello est bâti sur celle de ces hauteurs qui se présente la première lorsqu’on va de Tortone à Plaisance : les flancs des Apennins se rétrécissent brusquement, et la plaine s’étend davantage dans la vallée de la Scrivia. Aussi cette colline a-t-elle toujours été disputée dans les guerres qui ont eu pour théâtre les plaines d’Alexandrie, et a-t-elle dès l’antiquité gagné son nom (mons belli) aux combats dont elle a été l’objet. Ce fut là qu’eut lieu la rencontre de la cavalerie numide d’Annibal avec l’avant-garde de Scipion, qui fut le prélude de la bataille de la Trebbia, et ce fut là que, le 9 juin 1800, Lannes, en allant au rendez-vous de Marengo, passa sur le corps autrichien de Ott. Le combat de l’avant-garde d’Annibal pourrait être comparé à celui de la division Forey, si en effet l’attaque française avait dû se diriger comme celle du général carthaginois vers la Trebbia. Quant au combat de 1800, l’on sait que pour les positions françaises il n’a point d’analogie avec celui que nous venons de livrer. Lannes força le passage de Montebello, que les Autrichiens défendaient, tandis qu’aujourd’hui les Autrichiens ont vainement tenté de forcer la position, qui est demeurée entre nos mains.

Il est aisé de se faire une idée nette de la situation de Montebello. C’est un gros village placé sur le dernier mamelon des hauteurs qui s’avancent dans la plaine. Il domine par conséquent le chemin qui, venant de Voghera, longe diagonalement le pied de la colline et la contourne pour se diriger à l’est vers Plaisance. Du village, des feux plongeans, d’enfilade, d’écharpe, peuvent battre la route. Les pentes de la hauteur, coupées de champs, de ravins, de tertres et de bouquets d’arbres, offrent en outre aux tirailleurs des abris sûrs et commodes. Le village de Montebello est naturellement dominé lui-même par les relèvemens de la chaîne de collines qui vont se rattacher aux Apennins. La maison de plaisance de Genestrello marque le premier de ces échelons, et forme une sorte d’ouvrage avancé du village. Derrière la colline de Montebello, le sol s’abaisse et forme une vallée peu large au milieu de laquelle coule la Fossa-Gazza, ruisseau qui serait sans importance, s’il n’était encaissé entre des rives escarpées qui en rendent l’accès difficile à la cavalerie. Au-delà de la Fossa-Gazza est Casteggio, au pied d’une seconde colline, parallèle à celle de Montebello.

C’est sur le bord de la Fossa-Gazza, entre Montebello et Casteggio, qu’a commencé la lutte dans la journée du 20. Nous lisons dans une relation piémontaise écrite avec beaucoup d’intelligence, et dont l’exactitude nous est assurée, de curieux détails sur cette affaire. La plaine aux alentours de Montebello et de Casteggio était gardée depuis plusieurs jours par le colonel-brigadier de Sonnaz à la tête de deux régimens de chevau-légers sardes, huit escadrons donnant un effectif de 650 hommes. Le brigadier de Sonnaz avait été informé du mouvement d’une colonne autrichienne sur Casteggio, et avait reçu l’ordre, en cas d’attaque, de tenir bon jusqu’à l’arrivée des secours. Le colonel piémontais et ses cavaliers exécutèrent leur consigne avec