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scientifique du pays. En Angleterre, le mouvement scientifique obéit depuis bien longtemps à l’impulsion de la fameuse Société royale : cet établissement diffère de notre Institut en ce qu’il est fondé sur le principe de l’association, non sur celui de l’élection : la Société royale recherche le patronage des membres de l’aristocratie anglaise, et ne pourrait les compter dans son sein, si des exigences scientifiques leur en interdisaient l’accès. L’Amérique ne possède aucun établissement analogue à ceux que nous venons de citer : les savans sont trop éloignés les uns des autres sur ce vaste territoire pour fonder des académies permanentes. Résolus cependant à ne pas rester entièrement isolés et à se communiquer leurs travaux, ils ont fondé une véritable académie nomade sous le nom d’Association américaine pour le progrès des sciences. L’Angleterre possède une association analogue, et nos congrès scientifiques en fournissent aussi un exemple. Chaque année le lieu de réunion varie, des commissions se forment, on traite les questions les plus diverses, et les procès-verbaux des séances sont réunis en volume.

Il ne faut point se faire illusion sur les avantages de semblables congrès : ils ne répondent en général que bien imparfaitement à ce qu’on serait tenté d’en attendre. Personne n’en étant exclu, les travaux sérieux s’y trouvent noyés dans une multitude d’élucubrations sans aucune valeur : rien n’égale la fécondité des ignorans, ils ne perdent pas volontiers une occasion de faire prononcer leur nom et d’étaler leurs prétendues découvertes devant un public en moyenne incapable de discernement. L’acte le plus important de ces congrès est ordinairement le discours d’ouverture prononcé par le président, qui est presque toujours un homme éminent ; par une excellente habitude, il fait une analyse générale des travaux les plus remarquables de l’année. De pareilles communications sont très précieuses venant, en Amérique, d’Agassiz par exemple, ou en Angleterre de Richard Owen : de tels hommes ne touchent à aucun sujet sans y laisser l’empreinte de leur puissant esprit et sans s’élever à quelques vues philosophiques.

Les sociétés savantes sont extrêmement nombreuses aux États-Unis ; depuis dix ans surtout, il s’en est formé à l’infini : elles sont vouées à des sciences spéciales, telles que la médecine, l’agriculture, la météorologie, l’art de l’ingénieur, la statistique. Ordinairement une société centrale a son siège dans la capitale de l’état, et un système régulier de correspondance la rattache à des sociétés secondaires qui siègent dans les comtés : telle est notamment l’organisation des sociétés d’agriculture, qui rendent de très grands services au pays. Malgré la faiblesse des cotisations, ces sociétés jouissent de très beaux revenus, publient d’utiles travaux, des do-