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les roches cristallines se formant par voie humide, à des températures élevées, bien que très inférieures à leur point de fusion. Ainsi il ne faut même pas remonter à l’époque de la fusion première pour trouver l’origine de plusieurs des substances les plus abondantes dans l’écorce terrestre. Une fois les conditions de formation de tous les minéraux connues[1], on saura quel était l’état du noyau primitif à l’époque et aux lieux où les roches ont pris naissance. Cette genèse chimique est encore peu avancée; elle réclame de puissans moyens d’expérimentation et la mise en jeu des forces les plus actives dont l’homme puisse disposer.

Si la science n’a jusqu’à présent sur ce premier âge que peu de données positives, en revanche elle a fait admirablement connaître la formation des couches dont l’écorce est composée. Sur un premier noyau que nous ne pouvons qu’imparfaitement nous représenter, se sont précipités ou déposés les terrains de sédiment. Cette précipitation est le résultat de l’action des eaux, qui durent occuper une grande place sur la surface du globe, quand un premier travail de condensation se fut opéré. La répartition des masses solides et liquides, autrement dit des continens et des mers, a été très différente aux diverses périodes. L’origine aqueuse ou marine d’une grande partie des roches dont la terre est formée démontre invinciblement que notre globe à une certaine époque se présentait presque tout entier comme une masse liquide. Il est probable que les plus anciens sédimens des terrains qui sont appelés de transition et secondaires ont pris naissance dans des eaux maintenues à une température assez élevée par la forte chaleur qui régnait alors à la surface de notre planète. Riches en acide carbonique, les mers pouvaient tenir en dissolution des substances, telles que le calcaire ou le schiste argileux, qui se sont précipitées dès que la proportion d’acide carbonique est venue à diminuer. Tandis que les roches sorties de l’intérieur du globe se solidifiaient par voie de refroidissement, les couches déposées se durcissaient et acquéraient leur structure schisteuse sous l’influence d’une grande pression. Cet acide carbonique, qui se trouvait en si grande abondance dans l’eau, où il nourrissait une foule d’êtres, avait eu besoin, pour s’y mélanger, d’une première diminution de la haute température primitive des mers.

Au reste, la composition ancienne du globe n’était pas fort compliquée. Les roches ne nous présentent que des associations d’un

  1. M. Daubrée, dans un mémoire lu à l’Académie des Sciences en juin 1858, a montré les conditions dans lesquelles toute une classe de silicates hydratés, les zéolithes, ont pris naissance. Cette découverte met sur la voie de la formation des basaltes, des phonolithes et de diverses autres roches qui en sont composées.