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LITTÉRATURE ANGLAISE

UN ROMAN DE LA VIE MONDAINE.

Guy Livingstone, or Thorough, 1 vol. in-8o ; London, John Parkes, 1858.



Voici les mois rians de l’année, les mois où l’on va oublier au sein dés bois et sur le bord de l’océan les boues et les miasmes de Paris ; faisons de même, éloignons-nous de ce monde fiévreux et vulgaire de lionnes pauvres, de ménages entretenus et de romanesques agioteurs que nous présente une littérature viciée. Partons donc pour l’Angleterre, ne fût-ce que pour échapper aux mièvreries sentimentales et aux brutalités démocratiques. Pour que la transition ne soit pas trop brusque, j’ai choisi un livre nouveau qui roule sur les sujets scabreux chers à la moderne littérature française : le contraste des deux littératures sera ainsi moins accusé, et n’en sera peut-être que plus instructif. Il est intéressant de voir comment en Angleterre on comprend les vices, les passions, les caractères que nos dramaturges et nos romanciers se plaisent à peindre exclusivement depuis quelques années. Tous les personnages de Guy Livingstone, hommes et femmes, sont des mondains endurcis et des pécheurs de la plus redoutable espèce. Ils n’ont d’autres principes que les médiocres principes d’action de dandies sans peur, mais non sans reproche, de centaures sauvages et de chasseurs infatigables qui ne trouveront pas comme Nemrod grâce devant le Seigneur. Ils ont des muscles d’acier, un tempérament intraitable et des passions ingouvernables ; nul autre but dans la vie que la satisfaction de l’orgueil charnel. Certes ce sont des personnages beaucoup plus