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grès de Vienne aux révolutions de 1848 ; ils lient à la politique autrichienne la Toscane, Naples, les duchés; ils prévoient toutes les éventualités et s’appliquent à tous les intérêts extérieurs ou intérieurs. Au fond, ils sont pour ainsi dire la constatation diplomatique d’une pensée qui ne varie pas, qui est devenue la tradition même du cabinet de Vienne. Ces traités sont-ils conformes à la légalité européenne? On n’a qu’à jeter un coup d’œil particulièrement sur le traité signé entre l’Autriche et la Toscane le 12 juin 1815. Pourquoi s’allient l’empereur et le grand-duc? Pour assurer « le maintien du repos extérieur et intérieur de l’Italie. » Et quelles sont les conditions pour arriver à ces fins? Chacune des parties considérera comme propre et personnelle toute agression imminente contre les possessions de l’autre partie. L’empereur fournira au besoin quatre-vingt mille hommes au moins, et le grand-duc six mille combattans, le tout sous les ordres d’un général autrichien. Les places fortes destinées à assurer « la défense extérieure de l’Italie » seront constamment entretenues. Enfin la Toscane ne pourra faire la paix ni entendre aucune proposition que d’un commun accord avec l’Autriche.

L’importance de ce traité est évidemment dans l’objet même, dans le maintien du repos extérieur et intérieur de l’Italie. Or l’Italie, l’Italie en tant que nation n’existe pas selon les traités européens; l’Italie n’est qu’une expression géographique, ainsi que l’assurait un jour M. de Metternich. Une alliance de ce genre impliquerait des conventions semblables avec tous les autres états italiens, ou elle suppose qu’on traite sans eux des destinées de la péninsule, et le Piémont a bien le droit alors d’y voir un acte d’hostilité. Quel intérêt a d’ailleurs la Toscane? Elle n’a pas même une frontière à garantir, puisqu’on ne peut appeler de ce nom la limite qui la sépare des autres états compris également dans la « presqu’île de l’Italie » qu’il s’agit de défendre. Il est évident que cette association inégale n’a nullement en vue une menace peu probable contre la Toscane, qui n’a point d’ennemis. Cela veut dire après tout que le grand-duc entre dans le système de défense extérieure et intérieure de l’Autriche en Italie, et quant au secours de six mille hommes promis par la Toscane, cela signifie simplement que l’Autriche en cas de guerre peut disposer des forces militaires du grand-duché. Lord Palmerston disait dans le parlement anglais que l’Autriche devrait abandonner dans ces traités ce qui touche aux garanties intérieures en conservant le droit inhérent à la souveraineté de stipuler des garanties extérieures, que l’Angleterre avait des conventions de cette nature, notamment avec le Portugal. L’assimilation ne serait complètement exacte, il me semble, que si l’Angleterre était liée avec le Portugal pour la défense de la péninsule ibérique : d’où il