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royauté n’avait point de constitution. Où s’arrêtaient les droits de la ville ? où commençaient ceux du roi ? Aucun acte législatif ne l’indiquait. Dans ce contact de deux pouvoirs distincts et non définis, des froissemens étaient inévitables ; nous n’avions point alors de droit public réglé, l’arbitraire était la grande loi en beaucoup de choses, et souvent, il faut le dire, la royauté y eut recours pour détacher du parloir aux bourgeois certaines attributions, certaines prérogatives dont la possession avait pour base un droit traditionnel et un usage immémorial. D’un autre côté, à mesure que la ville s’agrandit, quand elle devint le siège permanent de la royauté et du parlement, le pouvoir municipal dut lui-même se retrancher dans de plus étroites limites ; il y eut dans le même lieu les choses du gouvernement et les choses de la commune, la charge particulière des habitans et la dette du pouvoir central. Alors commença à se produire dans les comptes de la commune cette distinction qui existe encore de nos jours. Ainsi la croisée des deux grandes rues centrales, qui était au point où se rencontrent aujourd’hui la rue de Rivoli et le boulevard de Sébastopol, était entretenue par le roi, les autres rues par la commune elle-même ; la voirie de Paris est encore pour partie à la charge de l’état.

Tant que le pouvoir municipal fut dans toute sa plénitude, la commune fut représentée par un conseil électif, à la tête duquel étaient le prévôt des marchands et ses adjoints ou échevins ; les attributions du corps municipal embrassaient, outre la navigation de la Seine jusqu’à Mantes, qui donnait lieu à des perceptions importantes au profit de la ville, l’administration des biens et la police de la cité. On retrouve les divers élémens de ces attributions dans les documens émanés du bureau de la ville et dans les actes publics du temps. Au XIIe siècle, un prévôt de Paris fut placé par le roi à côté du prévôt des marchands, et dut s’occuper essentiellement de la police judiciaire et des actes d’administration publique, qui en général rentrent aujourd’hui dans les attributions du préfet de police et du préfet de la Seine. Le parloir resta plus spécialement chargé des affaires de la commune, et ses actes perdirent dès lors tout caractère politique. Peu à peu cependant la royauté, plus dominante depuis l’abaissement de la féodalité, voulut attirer à elle jusqu’à l’action municipale, et alors commence une lutte inégale que la bourgeoisie parisienne soutint néanmoins avec ardeur, mais qui, après une longue et courageuse résistance, aboutit à sa défaite. Alors que devient le droit d’élection ? Il disparaît avec toutes les autres prérogatives municipales, et il n’en reste plus qu’une vaine image dans le choix des nouveaux administrateurs de la cité ; le roi désigne les candidats qu’il préfère, et sa volonté est obéie. En 1570, la population