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peu familiarisés sans doute avec les expressions employées par les artilleurs. L’usage a prévalu chez tous les peuples de désigner le calibre des pièces de canon par le poids en livres du boulet de fonte plein qu’elles peuvent lancer; ainsi un canon de 12 est celui qui peut recevoir un boulet de douze livres. Par une rencontre fortuite, le diamètre de ce projectile est presque exactement 12 centimètres. Les mortiers et les obusiers tirent leur nom au contraire de leur diamètre intérieur, exprimé en pouces ou en centimètres, le poids des projectiles creux étant variable pour un même calibre selon l’épaisseur de leurs parois. Par dérogation à cet usage, on a introduit récemment dans la marine l’habitude d’appeler des noms de 80 et de 120 les canons-obusiers de 22 et de 27 centimètres, sous le prétexte qu’ils envoient des obus répondant par leurs dimensions à des boulets pleins de ce poids; mais leurs affûts et la résistance de leurs parois ne leur permettraient pas de lancer de pareilles masses avec les charges en usage. Le plus gros canon que comporte le matériel français est le 50, dont se sert la marine, et qui a remplacé les anciennes pièces de 48. A Sébastopol, les Russes avaient en très grand nombre des canons-obusiers du calibre de 68 qui lançaient à volonté des projectiles creux ou pleins. Comme calibre de campagne, nous nous servons des canons de 8 et de 12, et même de 12 seulement, depuis que l’on a foré au diamètre de 12 centimètres les anciennes pièces de 8 en diminuant leur charge du tiers au quart du poids du boulet, innovation due à l’initiative personnelle de l’empereur Napoléon III, et qui a été essayée pour la première fois lors de la guerre de Crimée avec un succès complet. Les pièces de canon sont, suivant leur poids et la difficulté du terrain, attelées de quatre, six ou huit chevaux. On appelle batteries à cheval celles où tous les servans des pièces ont des chevaux. Dans les batteries montées, les servans sont ordinairement à pied, et dans les manœuvres rapides seulement ils montent sur les caissons ou sur la pièce elle-même pour ne pas rester en arrière. En Autriche, on a imaginé à l’usage de ceux qui ne peuvent trouver place sur le premier caisson un procédé tout à fait ingénieux : la flèche de l’affût est très longue, et quatre hommes s’y placent à califourchon, n’ayant rien pour se retenir et conserver leur équilibre au milieu des cahots auxquels les expose cette monture d’un nouveau genre, réminiscence sans doute du cheval illustre des quatre fils Aymon. On ne peut affirmer que cette composition des régimens d’artillerie n’ait pas été modifiée depuis peu; il a été question en effet d’imiter en Autriche l’augmentation de calibre et la diminution de charge adoptée en France, et qui permet à la même pièce de lancer indifféremment des obus ou des boulets. L’effectif d’une batterie, étant déterminé par le nom-