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deux s’unissent pour réclamer l’amélioration de la législation commerciale, l’exonération des métaux, de la fonte, du fer, de l’acier, qui sont indispensables à l’une et à l’autre. De telles mesures leur assureraient tout un avenir de prospérité, ouvert à l’origine par deux grands hommes, Colbert, qui fonda la marine commerciale, et Turgot, qui rendit libre à l’intérieur le commerce des produits agricoles, et dont il faut étendre les réformes au commerce extérieur.

Quelques mots suffiront pour résumer cette étude. Nous sommes un pays essentiellement agricole. Nous manquons du charbon, qui est le souffle vivifiant de l’industrie, du fer, qui en est l’arme indispensable; mais Dieu nous a libéralement réparti le soleil, la terre et l’eau. Il nous a placés dans une admirable situation pour user de ces avantages : à nous de faire le reste. Le passé de notre culture a été misérable, parce que, faute de moyens de transports, faute d’une nombreuse classe de consommateurs aisés, elle ne pouvait ni écouler ni vendre ses produits. Le présent s’améliore toutefois, il garantit l’avenir. Dans le nord et le centre, la grande culture s’organise avec les moyens d’action qui lui sont propres; dans le midi, pays des fruits et de la vigne, terre promise de la petite culture, celle-ci s’installe lentement, mais sûrement. Nous sommes baignés par les mers les plus commerçantes; nous avons des ports suffisans; notre population maritime pourrait, grâce à l’emploi de la vapeur, à l’usage des grands navires, suffire à un commerce triple. Nos matelots ont les deux qualités essentielles : ils sont disciplinés et durs à la fatigue. Leurs chefs commencent leur instruction sur la flotte, ils la finissent dans les écoles spéciales établies dans chaque port; ils forment un cadre d’officiers sans pareils pour l’activité et l’habileté. L’agriculture nous offre donc les élémens d’une production abondante, la marine les moyens d’une exportation assurée. Le lien qui les unit, le commerce, sera moins timide ou moins indolent, il faut l’espérer, lorsqu’il aura été dégagé des entraves douanières trop tendues qui l’embarrassent chez nous et à l’étranger. Dans l’état actuel, deux mesures importent surtout à la prospérité de l’une et l’autre industrie. La première, c’est la garantie de la liberté d’exportation, et par contre, l’admission de tous les produits agricoles à l’importation avec un simple droit réduit à un impôt équitable. La seconde dépend moins de notre volonté : il s’agirait de l’abaissement des droits prohibitifs qui frappent nos vins à certaines frontières étrangères. C’est le but que la marine et l’agriculture ne doivent jamais perdre de vue, car chaque dégrèvement obtenu sera pour elles une inappréciable conquête.


F. VIDALIN.