Page:Revue des Deux Mondes - 1859 - tome 19.djvu/850

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La répartition géographique des animaux dans les temps géologiques a été tout à fait différente de la répartition actuelle. On voit des tatous, des didelphes, des crotales, des alligators fossiles en Europe, quand ces animaux ne vivent plus qu’en Amérique; des chevaux et des chameaux fossiles en Amérique, quand aujourd’hui ces animaux sont originaires de l’ancien continent. Les êtres marins nous présentent des faits semblables : en Europe, nous trouvons fossiles un grand nombre de poissons et de mollusques maintenant spéciaux, les uns aux mers de l’Inde et de l’Amérique, les autres au Grand-Océan. Si la répartition des êtres dans les âges passés fut différente de la répartition actuelle, il faut sans doute l’attribuer surtout aux changemens de la configuration du sol terrestre et de la température. Suivant d’Orbigny, la chaleur dans les temps anciens fut presque uniforme sur le globe; les variations de nos climats n’existaient pas encore. Les mêmes genres et les mêmes espèces se retrouvent dans les terrains anciens : — en Bolivie, aux îles Malouines, près du Cap-Horn, au cap de Bonne-Espérance, dans l’hémisphère austral; — en Venezuela, sur les rives du Mississipi, au Canada, au Spitzberg, en Asie, en France, en Angleterre, etc., dans l’hémisphère boréal. Cette chaleur si uniforme devait être très intense. D’après l’opinion la plus généralement répandue, notre planète a été primitivement un globe de feu et elle s’est refroidie très lentement à sa surface. L’intérieur en est encore incandescent, ainsi que le prouvent les eaux thermales, les volcans et l’accroissement moyen d’un degré de chaleur par 30 mètres à mesure que l’on descend dans les profondeurs de la terre. Il est probable que pendant longtemps la chaleur fixe du centre du globe, a neutralisé la chaleur essentiellement variable du soleil. M. Deshayes, par ses belles études comparatives sur les animaux fossiles et vivans, est parvenu à prouver que, dans le commencement de l’époque tertiaire, la France devait être soumise à une température un peu plus élevée que la chaleur actuelle de l’équateur.

L’étude des êtres fossiles peut jeter quelque lumière non-seulement sur l’état de la température dans les temps anciens, mais encore sur la composition de l’atmosphère et des eaux. D’Orbigny a passé en revue les organes de la respiration chez les êtres fossiles, ceux qui ont habité les eaux, ceux qui ont vécu sur terre. Parmi les premiers, les uns, comme les éponges et d’autres rayonnés, n’ont pas d’organes spéciaux pour la respiration; les autres, comme les poissons et les mollusques, ont des branchies (vulgairement appelées ouïes). Parmi les animaux terrestres, les uns, comme les reptiles, ont des poumons; d’autres, comme les scorpions, ont des poches pulmonaires; d’autres enfin, comme les insectes, respi-