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dit[1] : « Le gouvernement français, tant par ses notes au Moniteur que par ses représentans à l’étranger, a constamment encouragé la cause de l’union. Si maintenant elle n’avait pas lieu, on se dirait que le gouvernement de l’empereur manque de force, ou qu’il a manqué de franchise… La France ne peut pas accepter que la guerre d’Orient, qui lui a tant coûté, reste sans le moindre résultat positif. Faudra-t-il, pour l’obtenir, recommencer la guerre ? Mieux vaudrait mille fois la guerre que le moindre déshonneur pour le drapeau français… La guerre n’est décriée que par ceux qui verraient dans la paix quand même la justification des dix-huit ans de paix à tout prix, qui voudraient faire descendre ce gouvernement au niveau de la couardise du dernier règne, assurés alors que ce serait le commencement de la fin. Certaines puissances font grand bruit de leurs craintes d’un coup d’état européen ; elles feraient mieux de renoncer à vouloir infliger à la France un Waterloo diplomatique. » Quant à nous, nous n’avons jamais voulu de la paix à tout prix, mais nous sommes de ceux qui, en 1840, ont cru que la possession viagère de la Syrie ne valait pas une guerre européenne, puisqu’en même temps on accordait à la France l’hérédité en Égypte ; nous sommes aussi de ceux qui ont cru alors qu’il était bon de rester hors du concert européen et de faire des préparatifs militaires pour montrer que nous étions prêts à tout, si on voulait refuser à la France toute satisfaction en Orient. Cette attitude convenait au gouvernement de 1830, qui n’était pas celui de la paix à tout prix, puisqu’il risquait hardiment le siége d’Anvers et l’occupation d’Ancône, ce que nous n’appellerons pas des coups d’état européens, mais ce que nous appellerons des audaces intelligentes. N’ayant pas voulu la guerre en 1840 pour la question de Syrie, la voudrons-nous en 1858 pour la question des principautés ? Nous avons assurément un grief contre l’Europe, mais nous nous gardons bien d’appeler ce grief un Waterloo diplomatique. Cette exagération de paroles nous déplaît toujours, et nous ne trouvons pas que la couardise du dernier règne ait rien à gagner à voir le règne suivant subir un Waterloo diplomatique. Sous tous les règnes et sous toutes les dynasties, nous voyons d’abord la France, et nous n’aimons pas que la déclamation mette si facilement en jeu notre honneur national.

Nous prenons très volontiers pour règle de l’attitude de la France aujourd’hui la circulaire du 20 août 1858 de M. le comte Walewski. M. Walewski ne croit pas, bien entendu, que l’acte du 19 août 1858, qui règle la condition politique des principautés, soit un Waterloo

  1. Pages 46 et 48.