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encore contre Hyder-Ali, roi de Mysore, et contre Nizam-Ali, vice-roi du Dekkan. Nous ne le suivrons point dans ces guerres de courte durée, interrompues par des trêves et par des traités. Attaqué dans le Gouzerate par les Anglais à la suite de négociations qu’il refusait d’accepter, Ragounâth dut enfin consentir à recevoir à Pounah un résident de la compagnie. Holkar et Sindyah venaient de l’abandonner pour toujours et de se rallier aux autres chefs qui reconnaissaient l’enfant de Naraïn-Rao et se liguaient contre le gouvernement britannique, « dont le nom, à ce moment critique de l’histoire des Mahrattes, se trouvait associé à la cause du crime et de l’usurpation[1]. »

À la tête de cette ligue, qu’on appela Barra-Bhaïes (les douze frères) pour marquer le nombre considérable des chefs qui la composaient, figurait le brahmane Balla-Dji-Djanardan, connu dans l’histoire sous le nom de Nana-Farnéwiz ; mais le premier rôle militaire appartenait à Madha-Dji-Sindyah. Lorsque ce dernier descendit dans le Gouzerate envahi par les Anglais, il avait sous ses ordres, en y comprenant les cavaliers de Touka-Dji-Holkar, environ vingt-deux mille hommes. Passant à gué la Nerboudda, les deux chefs amis vinrent jusqu’en vue de la ville de Baroda : là, ils rencontrèrent les troupes anglaises commandées par le général Goddard. Celui-ci venait de recevoir des renforts, et le gros de l’armée mahratte n’était pas encore arrivé de Candeish. Sindyah renonça à livrer bataille ; comprenant le péril de sa position, il entra en négociation avec le général anglais, qui de son côté, ne jugeant ni prudent ni politique de pousser plus loin les hostilités, prêta l’oreille à un arrangement. Le Mahratte espérait lasser son adversaire à force de lenteurs. Son but était de s’assurer par un traité particulier la possession des territoires qui lui appartenaient et de se soustraire ainsi aux obligations qui pourraient lui être imposées comme étant l’un des chefs de la confédération. En un mot, il voulait rester indépendant vis-à-vis des Anglais et vis-à-vis du gouvernement de Pounah, et sortir de cette guerre, dans laquelle l’avantage ne lui restait pas, plus solidement établi et plus puissant qu’auparavant. Quand il vit que ses projets ne pouvaient réussir, Madha-Dji-Sindyah fit partir en avant les gros bagages et commença à se retirer hors de la portée des forces anglaises. Les négociations se trouvant rompues, il cherchait à se dérober aux coups de son ennemi. Le général Goddard était resté une semaine campé près des Mahrattes, sans cesser d’observer leurs mouvemens. Enfin il attaqua leur camp à la faveur de la nuit et les mit en dé-

  1. Ce sont les propres expressions de sir John Malcolm : « Whose name was, at this crisis of Mahratta history, associated with the cause of guilt and usurpation. »