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peu d’améliorations, parce que la nature en fait à peu près tous les frais, la fabrication est au contraire une industrie tout entière à organiser, les méthodes indigènes ne pouvant satisfaire aux exigences de l’industrie européenne. À cette condition seule, l’indigo du Sénégal fera concurrence aux similaires de l’Inde.

Les bœufs du Sénégal, connus sous le nom de bœufs à bosse, à raison de la poche graisseuse qu’ils ont sur le garrot, et de bœufs porteurs, à cause de leur aptitude à porter de lourdes charges avec un pas égal à celui du meilleur cheval, sont recherchés dans nos Antilles, à la Guadeloupe principalement. On les apprécie pour leur douceur et leur sobriété, pour leur résistance à la fatigue et leur puissance de travail. Les fins et abondans pâturages qui couvrent surtout la rive gauche du Sénégal permettent de les multiplier à l’infini. Le bas prix de la viande, qui varie de 60 à 80 centimes le kilogramme à Saint-Louis, témoigne d’une grande facilité d’éducation, et promet des bénéfices à toute spéculation qui découvrira des débouchés. Pour un peuple qui veut naître à la civilisation, il n’est pas d’occupation plus convenable que l’élève du bétail.

Les gisemens connus de l’or ne se trouvent pas dans les territoires dès à présent soumis à l’autorité française ; ils sont dans le Bambouk, état du bassin supérieur du Sénégal, constitué en une espèce de confédération indépendante. Le Bambouk fut le premier Eldorado de l’Europe. Dès le XVe siècle, il attira les Portugais au temps de leurs courses aventureuses sur la côte occidentale d’Afrique : ils y pénétrèrent et s’y établirent, mais ils ne purent résister ni à leurs propres dissensions, ni aux atteintes du climat, ni aux attaques des naturels ; après une occupation de courte durée, ils disparurent, ne laissant d’autre trace de leur séjour en ces lieux que quelques débris de constructions, quelques mots de leur langue mêlés à la langue mandingue, qui est celle du pays. Les Français leur succédèrent, représentés par les compagnies qui avaient sous l’ancien régime le privilège exclusif du commerce de la Guinée et de l’Inde : leurs directeurs à Saint-Louis résolurent de reprendre l’œuvre des Portugais avec plus de prudence et d’habileté. C’est principalement en vue de l’or du Bambouk que Brüe, à la fois le plus entreprenant et le plus sage de ces directeurs, accomplit, lui le premier, en 1698, un voyage au pays de Galam, où il eut le talent de vaincre tous les obstacles qui avaient arrêté ses prédécesseurs et la gloire de poser les premiers fondemens de la puissance française dans le Haut-Sénégal. Le fort construit par ses ordres, au lieu de Dramanet, prit le nom de Saint-Joseph ou de Galam, et marqua le succès de sa politique pendant quelques années. Malheureusement, pendant un congé qui ramena Brüe en France, ses agens, moins habiles que lui à manier l’esprit des indigènes, moins justes probablement dans leurs transactions,